PAS TOUCHE AUX ARCHIVES ! NON A LA DÉLOCALISATION ! NON A LA VENTE A LA DÉCOUPE !

AUDREY AZOULAY, MINISTRE DE LA FAILLITE DES ARCHIVES NATIONALES !

C’est avec la plus extrême vigueur, en bloc et en détail, que le Syndicat des Archives de France CGT condamne les récents arbitrages rendus par le gouvernement et la ministre de la Culture, Audrey Azoulay, au sujet des Archives nationales. Par leur nature et leur nocivité, ces arbitrages sont l’expression achevée de la faillite archivistique, scientifique, intellectuelle, financière et sociale, en gestation depuis quatre ans.

Contrairement à ce qu’affirme Audrey Azoulay, il n’y a rien de culturel ou de patrimonial à fermer définitivement le site des Archives nationales de Fontainebleau ni à amputer de 9 000 mètres carrés de locaux le site des Archives nationales de Paris ! Ce sont des projets banqueroutiers. Rien d’autre !

Fermeture du site de Fontainebleau : une addition à 200 millions d’euros !

La liquidation du site annoncée par la ministre signifierait : 1/ la perte des 200 kilomètres linéaires (kml) de capacité de stockage du site, soit un tiers de la capacité totale de stockage de l’institution en Ile-de-France ; 2/ conduirait le site de Pierrefitte-sur-Seine à la saturation à cause du transfert des 90 kml de documents conservés à Fontainebleau ; 3/ obligerait à préempter la réserve foncière du site vingt ans avant le terme initialement prévu ; 4/ nécessiterait la construction d’un nouvel équipement pour un coût déjà évalué par la rue de Valois à 200 millions d’euros ! A cette somme de 200 millions d’euros, il faut ajouter le coût de la perte des bâtiments (qui ont coûté environ 500 millions de francs) et qui sont loin d’avoir été amortis, mais également le prix de la perte de la réserve foncière de Pierrefitte.

Ainsi, seulement trois ans après l’inauguration par François Hollande du site de Pierrefitte-sur-Seine, bâtiment qui a coûté 200 millions d’euros et qui devait répondre aux besoins de l’institution pour trente années (jusqu’en 2043 !), voilà que Audrey Azoulay annonce sans sourciller le doublement du prix du projet initial !

A l’inverse de ce naufrage archivistique et financier, nous exigeons la rénovation des équipements du site. Rappelons que les services spécialisés du ministère de la Culture ont estimé le coût de la démolition du site bellifontain à 36 millions d’euros pendant que le coût de sa rénovation était évalué, lui, à 43 millions d’euros ! Soulignons que cette rénovation permet de sauvegarder plus de 70 % de la capacité de stockage, des dépôts et équipements existants mais aussi de maintenir sur place les 51 emplois qui y sont affectés. Complétée par une mise aux normes techniques et technologiques intégrale mais aussi par la construction d’une nouvelle structure qui permettra de reconstituer la capacité de stockage, nous affirmons que la remise en exploitation du site coûterait au total 88 millions d’euros, soit la bagatelle de 110 millions d’euros de moins que le projet de Audrey Azoulay !

A Paris, une amputation au nom de la spéculation immobilière !

En septembre 2010, Nicolas Sarkozy annonçait sa décision de s’approprier 10 000 mètres carrés de surfaces et locaux du site parisien des Archives nationales pour y installer sa Maison de l’Histoire de France, son musée réactionnaire de l’identité nationale. Après deux ans d’une lutte unie et acharnée du personnel et de ses organisations syndicales, le projet présidentiel de MHF était défait. Une première dans l’histoire de la Ve République.

Aujourd’hui, le gouvernement et Audrey Azoulay, par l’annonce d’amputer près de 9 000 mètres carrés de surface du site, remettent sous une autre forme le projet de MHF sur le métier ! Là encore, absolument rien d’archivistique, de culturel ou de patrimonial. Non, il s’agit d’une basse et sombre affaire de spéculation immobilière, une affaire de gros sous, le genre d’opération de « braderie des bijoux de famille » et de vente à la découpe décidée à Matignon ou à Bercy au profit unique d’investisseurs privés fortunés.
En effet, le gouvernement et Audrey Azoulay ont décidé de réduire le nombre des implantations parisiennes des services d’administration centrale du ministère de la Culture. Cela passe notamment par les ventes des bâtiments de la rue des Pyramides (qui héberge le Service des Musées de France et la DGLFLF) et du 61 de la rue de Richelieu ; par l’abandon du site de Saint-Cyr (qui héberge la SDSI) ; par la fin des baux locatifs comme celui 64 de la rue Beaubourg (qui héberge la DGCA). Au total, plus de 500 agents sont directement concernés par cette opération de délocalisation/spéculation immobilière qui a pour conséquence concrète de les jeter à la rue et de justifier la suppression d’au moins 105 emplois.

C’est à ce moment précis qu’entre en jeu le site des Archives nationales de Paris. Car sur les 500 agents nomadisés, Audrey Azoulay n’a rien trouvé de mieux que de prévoir d’en installer 250 sur le site des Archives nationales de Paris en lieu et place des dépôts, bureaux, ateliers et locaux dont l’institution a pourtant un besoin absolu ! Les 250 autres agents seraient « entassés » dans l’immeuble de la rue des Bons-Enfants dont les locaux seraient « densifiés » de 30 %, passant de 850 à 1 100 agents présents ! Soulignons que Audrey Azoulay prend soin de ne surtout pas s’appliquer les « sacrifices » qu’elle demande aux autres : le site de la rue de Valois resterait vierge de toute mise à contribution (ni densification, ni réorganisation).

Les premières évaluations des coûts de cette opération d’installation de 250 agents des services de centrale sur le site parisien des Archives nationales font état d’un budget minimum de 41,6 millions d’euros, soit une somme moyenne de 166 400 euros par agent. Pour financer ce funeste projet, Audrey Azoulay compte récupérer une partie du produit des ventes des immeubles Pyramides et Richelieu dont elle estime la valeur à 80 millions d’euros. En gros, ce sont les victimes de la délocalisation qui financent eux-mêmes le supplice. Mais cet optimisme financier béat, ce volontarisme forcené, tranchent avec une réalité bien plus sombre : les biens immobiliers de l’Etat sont toujours vendus à vil prix ! Au ministère de la Culture, les ventes des hôtels Kinsky et Vigny-Croisilles le prouvent. Le premier, d’une valeur estimée de 70 millions d’euros a été vendu 38 millions d’euros. Le second, estimé à 60 millions d’euros, a été cédé 28 millions d’euros ! En tout cas, Audrey Azoulay entend bien faire payer aux agents le prix de son aventurisme et de sa politique de casse des missions, des institutions et du service public culturel de l’Etat.

Pas un euro de budgété pour la défense du patrimoine archivistique !

Contrairement aux propos rapportés par la presse, pas un euro, pas un kopeck, n’est budgété ou prévu pour améliorer les conditions matérielles de conservation des documents. Il n’existe aucun programme, aucun calendrier de travaux prévisionnels, pas plus qu’il n’existe de plan de charge pour les Archives nationales alors que les espaces et locaux visés sont « remplis » de documents (Minutier central des notaires parisiens) ou occupés par des agents (Minutier, SIAF, DGP).

Les seuls budgets « monuments historiques » qui existent sont consacrés à l’installation des décors de la Chancellerie d’Orléans dans l’hôtel de Rohan, opération qui est programmée depuis 2009 et qui est rentrée en phase opérationnelle depuis 2014. L’installation des décors de la Chancellerie n’a donc absolument rien à voir avec le projet de Audrey Azoulay.

Enfin, nous réfutons l’argument qui consiste à faire croire que moins il y a de dépôts et de documents d’archives présents sur le site parisien et plus l’institution serait visible et ouverte à la population.
Mais plus au fond, nous constatons que le résultat de cette OPA hostile aboutirait à la perte sèche de 12 kml de capacité de stockage. En conséquence, Audrey Azoulay doit faire rentrer 77 kml de documents dans 60 kml de travées. C’est comme si un transporteur routier voulait charger 25 mètres cubes de marchandises dans un camion dont le volume maximum est de 20 mètres cubes !

Irrévocablement, l’argument « patrimonial » de Audrey Azoulay est un leurre, un vulgaire élément de langage.

C’est pourquoi la CGT-Archives se dresse vent debout contre ces projets néfastes et exige :

NON À LA FERMETURE DU SITE DE FONTAINEBLEAU !

NON À L’AMPUTATION DU SITE DE PARIS !

ABANDON DU PROJET DE VENTE A LA DÉCOUPE DU MINISTÈRE !

Paris, le 2 juin 2016