Le second tour des élections présidentielles

Dans un contexte marqué par une très grande insatisfaction sociale (toutes les enquêtes placent l’emploi, les inégalités et le pouvoir d’achat au premier rang des préoccupations… bien avant la sécurité et
l’immigration), la participation considérablement élevée au premier tour des élections présidentielles montre que les salariés, les agents du secteur public, les chômeurs, les jeunes, les retraités s’impliquent
tous très nombreux dans cette consultation.
La CGT, qui avait appelé ceux-ci à intervenir pleinement dans les débats et les choix concernant leur avenir et celui de la société française, ne peut que s’en féliciter.

Indiscutablement, cette mobilisation exceptionnelle de l’électorat exprime de grandes attentes et de grandes exigences. Compte tenu de la situation à laquelle est aujourd’hui confrontée la population de notre pays, et qui continue de se dégrader très dangereusement, c’est loin d’être une surprise !

Alors qu’elle se classe dans le peloton de tête des nations les plus riches, la France compte aujourd’hui 7 millions de pauvres (dont 3,2 millions de travailleurs pauvres) et des millions de familles qui se débattent dans de terribles difficultés économiques. Elle s’illustre aussi, notamment, par des licenciements qui frappent des dizaines de milliers de salariés, par des quartiers ghettoïsés, par une crise du logement social, des services publics de l’éducation et de la santé, par un recul de la protection sociale, un accroissement de la souffrance au travail et de nombreuses discriminations.
Sur un autre versant – pour ne pas dire dans un autre univers – les profits des grands groupes et la rémunération des actionnaires ne cessent de progresser au détriment du sort fait aux femmes et aux
hommes dans l’entreprise. Les exonérations de charges et les aides publiques octroyées au patronat se multiplient, et les plus riches se voient accorder toujours plus d’allègements d’impôts.
Véritablement, ce modèle de société est socialement injuste et économiquement absurde !

Face aux injustices qui grandissent et aux inégalités qui se sont creusées – particulièrement dans la dernière période – une large majorité de citoyens aspire à d’urgents et profonds changements dans
l’orientation politique et sociale de notre pays :
des réponses aux antipodes des options libérales, s’attaquant de front à la loi du tout marchand et du profit.

Le bilan du gouvernement sortant est sans équivoque :
nos retraites et nos salaires ont été durement mis à mal par des mesures brutales entérinant et aggravant la baisse du pouvoir d’achat des actifs comme des retraités,
la précarité de l’emploi (CPE, CNE, …) et l’insécurité sociale ont atteint un niveau record,
le déclin de l’industrie, livrant les populations de nombreuses régions au chômage et à la misère, s’est très nettement accéléré,
les services publics sont asphyxiés au mépris d’immenses besoins sociaux non satisfaits – pour mieux les démanteler ou les privatiser – ce qui porte durablement atteinte à la cohésion sociale,
les politiques répressives et sécuritaires ont pris le pas sur les libertés démocratiques.

Des centaines de milliers d’entre nous ont agi, défilé et lutté, la CGT en tête, contre ces politiques gouvernementales et la spirale vertigineuse de reculs dont elles sont porteuses.

Ensemble, et ce, quelle que soit l’issue des élections, il va de soi que nous demeurerons très fortement mobilisés. Nous ne nous contenterons pas de réponses différées dans le temps et ‘accepterons aucune nouvelle régression.
Les échéances électorales ne constituent pas un sésame pour la satisfaction des revendications, et elles ne sauraient correspondre le moins du monde à une quelconque atonie du mouvement social.

Le second tour des élections présidentielles opposera donc Nicolas SARKOZY, candidat du parti au pouvoir depuis 2002, et Ségolène ROYAL.

Indépendante des formations politiques, la CGT n’a pas à émettre de consigne de vote pour l’un ou l’autre des candidats restant en lice, même si, bien entendu, un signe égal ne saurait être tiré entre les deux.

Dans ses expressions, la CGT a maintes fois rappelé le danger des idées d’extrême droite portées par le Front national, mais pas seulement. Elle a aussi dit sa vive inquiétude face aux propositions du candidat SARKOZY visant, entre autres, à réduire le rôle des syndicats et à s’attaquer au droit constitutionnel de grève dans les entreprises, les administrations et les universités. La CGT a aussi dénoncé la proximité dudit candidat avec les thèses du MEDEF, et a alerté sur le risque qu’à l issue des élections, s’installe un gouvernement totalement acquis à sa vision ultralibérale de la société et de l’économie, dont les salariés et leurs libertés feront en premier les frais.

Dans la Fonction publique, les grands mouvements unitaires et toutes les luttes encore récemment menées dans les territoires et dans de nombreux secteurs ont très nettement exprimé les préoccupations des fonctionnaires et agents publics, tant sur la question salariale, que sur les effectifs et les missions.

Une majorité de la population affirme aujourd’hui avoir besoin de services publics et d’une Fonction publique aux missions renforcées. Cela passe par l’octroi des moyens nécessaires à leur fonctionnement, par davantage d’emplois publics statutaires, par des personnels mieux rémunérés et mieux considérés. Nous refusons toute forme de remise en cause de ces garanties fondamentales de même que nous réfutons le dogme libéral des privatisations, des suppressions d’emplois publics et du désengagement de l’Etat (déjà bien à l’oeuvre depuis cinq ans), autant de points clés du programme de Nicolas SARKOZY, diamétralement opposé aux besoins des usagers comme aux attentes des agents. Egalement, nous dénonçons avec la plus grande force toute stigmatisation des fonctionnaires que certains, dont la violence des propos n’a d’égal que l’extrémisme des idées, osent taxer de privilégiés et résumer à un coût, à une charge insupportable pour la collectivité.

Pour répondre dans le sens du progrès social aux besoins de la Fonction publique, assurant des missions d’intérêt général au service de la Nation et de la population, la mise en oeuvre d’une politique
radicalement différente est indispensable.
Il faut notamment, selon la CGT, instaurer une fiscalité solidaire et progressive, modifiant profondément la répartition des richesses créées en faveur du travail et procurant au service public les moyens de se développer. Il faut aussi renforcer les garanties statutaires communes aux trois versants de la Fonction publique et revenir sur les dispositions législatives adoptées durant la présidence actuelle qui participent de la casse de la Fonction publique.

Dans la dernière période, le ministère de la culture n’a pas été épargné, loin de là, par ce mouvement.
Compression d’effectifs, abandons de missions par pans entiers, notamment dans le secteur du patrimoine, transfert de l’Inventaire et de Monuments historiques sous couvert d’une « décentralisation » qui ressemble davantage à un désengagement pur et simple de l’Etat, externalisations galopantes, etc. Cette néfaste politique, qui constitue une attaque en règle contre le service public culturel, Nicolas SARKOZY entend bien la poursuivre et l’accélérer, comme l’on peut aisément le comprendre à la lecture de sa réponse à la CGT-Culture qui l’avait interpellé, en mars dernier,
sur le devenir du ministère et de son action.
En particulier, il prône que l’Etat – autrement dit le ministère – allège encore ses structures, se félicitant au passage de la loi de 2003 qui a institué la mise en concurrence des fouilles archéologiques. Il dit aussi souhaiter un net accroissement des financement privés afin que le budget de l’Etat en matière de politique culturelle se trouve pleinement relayé par d’autres acteurs. Il va sans dire que, pour la CGTCulture, ces orientations sont extrêmement préoccupantes.

Dans ce domaine, comme en ce qui concerne l’emploi, le pouvoir d’achat, les conditions de travail, nos retraites, l’accès aux droit fondamentaux en matière de santé, de logement, d’éducation, de transport, d’énergie,… d’autres orientations sont nécessaires et possibles.
Il n’appartient qu’à nous de leur donner réalité et d’intervenir sur les choix qui conditionnent notre avenir. Rejoindre la CGT dans l’action, et la rejoindre tout court, c’est assurément se donner les moyens d’être entendu !

Paris, le 2 mai 2007

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