Le dialogue social en panne, l’exemple cuisant du MUCEM

En matière de relations sociales, on croyait avoir touché le fond pendant la campagne présidentielle avec les violentes attaques du candidat sortant contre les organisations syndicales et la CGT en particulier.


L’alternance politique intervenue en mai 2012 a laissé entrevoir la possibilité d’un renouveau du dialogue social. Mais 8 mois plus tard, nous sommes passés de l’impatience au constat d’échec et à l’exaspération.

Le cabinet de la Ministre a eu largement le temps d’imaginer des formes constructives et d’ouvrir des discussions avec les représentants des personnels sur les dossiers de fond. L’arrivée de plusieurs nouveaux directeurs auraient pu également contribuer à débloquer la situation. Mais cette attente est douchée.

Le MUCEM, qui devrait ouvrir ses portes à Marseille au printemps prochain, constitue de ce point de vue un exemple cuisant. Malgré nos alertes répétées, malgré nos multiples demandes écrites ignorées et un courrier à la Ministre – resté lui aussi sans réponse -, le cabinet et le Directeur général des patrimoines ont refusé de rouvrir le dossier laissé par leurs prédécesseurs.

Le gouvernement de Nicolas Sarkozy voulait à toute force que le MUCEM soit un nouvel EPA, la nouvelle majorité fera un EPA. Ils voulaient un EPA leur permettant d’externaliser plus facilement une bonne partie des missions et des emplois de ce nouveau musée national, les actuels locataires de la rue de Valois viennent de confirmer ces privatisations.

Ils ravalaient les instances représentatives des personnels à des chambres d’enregistrement, ceux qui sont aux commandes aujourd’hui en font autant. Car que croyez-vous qu’il arriva quand vos élus au comité technique (CT) de la direction générale des patrimoines rejetèrent à l’unanimité, le 20 décembre, le décret érigeant le MUCEM… ? Le Directeur des patrimoines revint un mois plus tard avec le même texte pour la même politique.

Ce faisant, Monsieur le Directeur des patrimoines a agi – sans que le cabinet n’y trouve rien à redire – en toute contravention avec la lettre et l’esprit des textes régissant les comités techniques (CT) mis en place voilà plus d’un an en remplacement des comités techniques paritaires.

Or, l’une des avancées majeures des CT porte justement sur l’opportunité et l’obligation pour l’administration d’ouvrir un temps de concertation supplémentaire lorsqu’un projet de texte s’est heurté à l’opposition unanime des représentants du personnel présents (ce qui fut précisément le cas au CT de la direction générale des patrimoines du 20 décembre 2012 qui examinait le projet de décret du MUCEM).

Nous avons donc la ferme intention de défendre mordicus les prérogatives des CT et de rappeler la Ministre et le Directeur général des Patrimoines à leurs obligations politiques et à leur devoir devant les personnels, les CT et leurs représentants.

Mais cet exemple, pour emblématique qu’il soit, est loin d’être isolé. On ne compte plus les courriels et les courriers qui essuient le pire des refus : un silence méprisant. On ne compte plus les mesures négatives prises, avant, par des libéraux décomplexés et qui continuent de courir malgré « le changement ».
Il en va ainsi notamment des deux nouveaux accords relatifs à la numérisation des collections de la BNF qui viennent d’être conclus via la Filiale BNF-partenariats : 70.000 livres anciens seront numérisés par la Société ProQuest et 200.000 vinyls par les sociétés Believe digital et Memnon archiving services. Ou comment la BNF et le ministère de la culture privatisent le patrimoine public pour dix ans et permettent à des sociétés privées de dégager des bénéfices avec la commercialisation de ces collections numérisées. Là encore, nous avions écrit à la Ministre (le 9 octobre 2012). Là encore, aucune réponse !

Quand la Ministre se décidera-t-elle à engager les débats sur la situation critique des musées et plus largement sur les problématiques complexes des patrimoines ? Quand se résoudra-t-elle à dévoiler et à ouvrir l’agenda social dont elle a fait la promesse dès juillet 2012, et quand concèdera-t-elle, enfin, un peu de transparence sur les lois en préparation et dont nous ne savons rien : loi sur la création, loi sur le patrimoine, acte III de la décentralisation ?
Toutes ces attentes qui s’accumulent ont déjà débordé. Les réponses aux revendications des personnels, c’est maintenant.

La journée de grève et de manifestations du 31 janvier prochain est une étape incontournable dans la construction du rapport de forces indispensable au ministère de la culture comme à la Fonction publique. Comment imaginer sinon, dans les dispositions actuelles du gouvernement, que nous puissions obtenir des avancées significatives sur nos salaires et nos carrières, et sur l’amélioration du service public.

Le 31 janvier, pour des salaires décents, pour des déroulements de carrières justes, pour le respect de nos conditions de travail, pour une vie meilleure, ensemble prenons notre destin en main.

Le changement, c’est nous, c’est notre unité, c’est notre solidarité, c’est notre détermination intacte. Le changement passe nécessairement par notre mobilisation.

Paris, le 28 janvier 2013

Le dialogue social en panne, l’exemple cuisant du MuCEM