Une baisse historique du budget de la Culture

Pour un budget de combat, celui-là laisserait K.O. les politiques publiques culturelles portées par un ministère « saigné à blanc » par la RGPP et 5 ans du dogme de la calculatrice comme seule ligne d’action. « Le budget de la Culture sera sanctuarisé durant tout le quinquennat » disait le candidat Hollande. C’est bien mal parti ! Et ce n’est encore qu’un apéritif, le projet de traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), s’il était ratifié, inscrirait dans le marbre ces orientations lourdes.

Les emplois. Même si après avoir soufflé le pire (-750 emplois par an) on ne nous annonce « plus que » 100 emplois supprimés (15 titre II, 85 titre III), il n’empêche que ces suppressions ne seront pas indolores. Avec la création (Mucem) et l’agrandissement d’établissements (Arts de l’Islam au Louvre par exemple) qui exigent des créations nettes d’emplois, mais en réalité pourvus par des redéploiements, c’est pas loin de 200 emplois qui seront frappés par des mesures aux couleurs de la RGPP, pourtant annoncée comme stoppée.
Si l’on y ajoute les emplois des opérateurs qui, pour des raisons budgétaires, ne seront pas disponibles, nous revenons à des totaux de suppression comparables aux années d’avant « le changement ».

Le budget. Si le coup de rabot n’est pas uniforme, certaines mesures apparaissant positives, la curiosité des crédits de la mission Culture cette année repose sur la sanctuarisation des crédits d’une action, et d’une seule (si on en croit le dossier du Ministère communiqué aux organisations syndicales), celle en faveur du spectacle vivant et des arts plastiques ! On est loin des engagements de François Hollande sur la sanctuarisation du budget Culture.

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Comme la stratégie d’abandon des grands projets n’a pas suffi dans la construction budgétaire 2013 pour épargner les missions fondamentales, ce sont les vieilles et dangereuses recettes RGPP qui ont été mises en avant : assèchement du financement public des missions, précarisation des financements publics par l’accroissement des ressources propres, développement du mécénat, restructurations administratives, suppressions de postes… et financement de missions par un recours parfois sans discernement à la dépense fiscale (exonérations diverses et variées dont l’estimation est mal connue). En revanche, une bonne nouvelle est l’élargissement de l’assiette de la redevance d’archéologie préventive.
Cette construction budgétaire des politiques publiques culturelles suscite le développement de pratiques culturelles censitaires, qui laissent de plus en plus aux riches (individus et collectivités), la faculté de choix culturels et de l’accès à la Culture. Nous ne voyons pas de rupture avec la logique de libéralisation de la Culture à l’œuvre ces dernières années.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes !

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Sources : Projet de loi de finances 2013, crédits proposés pour 2013 par programme pour le ministère de la Culture, informations annexes.

Une telle construction budgétaire, qui trouve son inspiration dans le dogme du remboursement de la dette, aurait pour conséquence, si elle devait être votée en l’état, d’amplifier de manière exponentielle les effets extrêmement néfastes sur les politiques publiques culturelles.

Elle exprime aussi le renoncement aux ambitions politiques du gouvernement en matière culturelle. Les chiffres contredisent tous les discours ministériels sur le financement prioritaire des missions fondamentales et essentielles du Ministère. Ce budget est très en dessous des besoins.

Pour l’administration centrale et déconcentrée et ses services à compétence nationale, quid des politiques en matière d’architecture et de protection du patrimoine, d’acquisition et d’enrichissement des collections, de rénovation, extension ou réhabilitation des Écoles, de soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant que l’État apporte, via les DRAC, du soutien à l’action culturelle internationale, de l’enseignement spécialisé, mais aussi du développement culturel et des actions en faveur de la cohésion sociale, etc… ?
Quid des politiques d’action sociale, de prévention, du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique, des dépenses immobilières et des frais liés aux locaux ?

Les bonnes vieilles recettes sont convoquées : mesures d’organisation, recherche de mutualisation de fonctions et densification
des immeubles de bureaux !

Pour les établissements publics, les subventions qui leur sont allouées pour charge de service public devraient connaître une forte baisse. A l’instar des années précédentes, le gouvernement demande aux ministères, dont celui de la Culture, de financer les baisses de subventionnement par de nouvelles ponctions sur les fonds de roulement des établissements publics. Cette politique à courte vue va mettre en danger les établissements et leurs rôles dans les politiques publiques. Sur cette question, la ministre a tenu à préciser que cette démarche ne pouvait se reproduire tous les ans ; et pourtant, ce procédé a déjà été utilisé en 2012. Dans la même logique budgétaire proposée, les établissements sont invités à « poursuivre leur effort de maîtrise de dépenses, de développement de leurs ressources propres, qu’il s’agisse de billetterie, de mécénat ou de recettes diverses de location d’espace »… Tout un programme !

Cerise sur la gâteau, nous ne voyons toujours rien venir sur une gouvernance nouvelle et la tutelle des établissements.

En outre, le CNC se verrait ponctionner 150 millions d’euros. Il est appelé « comme tous les opérateurs de l’État à participer à l’effort de redressement ». En clair, cette ponction représente plus que le plan de numérisation des salles (125 millions sur 3 ans) et sera faite sur la réserve « numérique » destinée à financer le plan d’aides à la numérisation des œuvres de patrimoine et à finaliser le reste des salles non encore numérisées.

C’est dans ce paysage un peu dévasté que l’on aperçoit une bonne nouvelle : la budgétisation complète des crédits relatifs aux bourses d’études accordés aux étudiants pour l’année 2013 ; toujours ça de pris !

L’allocation détaillée des crédits qui devraient paraître dans les documents budgétaires les jours prochains seront éclairants sur les contenus des politiques publiques que le gouvernement entend mener à la Culture. La CGT-Culture ne manquera pas d’y revenir.

Pour la CGT, la Culture est un droit fondamental et doit bénéficier en conséquence d’un budget approprié et augmenté à la hauteur des besoins !

Lors de l’inauguration du Département des Arts de l’Islam par le Président de la République, la CGT avait arraché un rendez-vous avec son conseiller culture. Nous avions alors pu lui remettre un courrier adressé au locataire de l’Élysée rappelant ses engagements et la nécessité de doter les politiques publiques culturelles des moyens enfin à la hauteur des enjeux. Le 1er octobre, le secrétaire général du Président nous répondait : « …nous sommes conscients des effets qu’a eus la RGPP et du fait que le ministère de la culture vit et agit grâce à ses agents. »

Nous sommes totalement d’accord avec lui : s’il existe encore un ministère de la culture aujourd’hui c’est bien grâce à l’implication de ses agents, dans le travail comme dans les luttes !

Au regard des exemples européens où elle s’impose aux peuples et où ses effets sont à l’opposé des intentions affichées, cette politique de rigueur absurde et injuste doit être combattue.

Pour la culture, pour les services publics, pour l’emploi, pour une société émancipée, tous ensemble,
continuons !

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