Carlos ou la vie de château : Si Versailles m’était compté

Le désormais ex-PDG de Renault et de l’alliance Renault-Nissan fut longtemps célèbre dans l’industrie automobile et parmi le Ghota du capitalisme mondial pour ses talents de « tueur de coûts ». Au début des années 2000, il impose une réduction drastique des effectifs chez Nissan après avoir demandé aux salariés de Renault de se serrer la ceinture tout en accélérant encore la cadence.

Vingt ans plus tard, ce très très cher Carlos a été rattrapé par la justice japonaise. Il aura fallu qu’il se voit offrir un séjour prolongé à l’ombre du soleil levant pour que le directoire de la holding commence à s’intéresser au train de vie et aux méthodes très spéciales de son patron de choc.

On le sait, un malheur n’arrive jamais seul. Pour Carlos, l’adage n’en est pas moins cruel : le parachute doré estimé à 30 millions d’euros, qui lui était promis par Renault, devrait se mettre en en torche. Plus dure sera la chute !

Et notre star du CAC 40 tombe de très haut. Révélation après révélation, on découvre peu à peu le train de vie et l’extrême raffinement de cet homme de goût.

L’idylle de Carlos avec LE Château – de Versailles est si belle, si touchante et romantique qu’on a peine à la lui reprocher. D’ailleurs, ici, au pays de Mirabeau, de Danton et de Robespierre, on ne lui dit presque rien ou si peu. Sûrement toute la magie et le charme d’une histoire à vivre.

Dans la série des fêtes galantes et des fastes de son empire, rien n’était trop beau pour Carlos, sa famille, ses amis, sa cour.

Un anniversaire et un mariage !

Un anniversaire d’abord, celui des 60 ans de notre ami Carlos, célébré au Château le 9 mars 2014, dans la galerie des Batailles pour la somme rondelette de 600 000 €. C’est vrai qu’il faut déjà compter 160 000 € pour la location de la salle des fêtes et l’intervention agréée des artificiers. Alors pensez donc, si vous ajoutez la note d’un Grand Chef et les dépenses accessoires…

Un mariage ensuite, celui de Carlos, fêté comme il se doit le 8 octobre 2016 au Grand Trianon, loué pour l’occasion et parce qu’il le valait bien pour la modique somme de 50 000 €.

Où l’on apprend qu’à moitié étonnés que le grand homme ne reculait devant aucun sacrifice pour restaurer le temps d’une soirée toute la magnificence de l’Ancien Régime, certes au frais de la princesse mais surtout, selon toute hypothèse, de la puissante alliance.

Où l’on apprend aussi que la direction du Château a l’esprit très large et une conception quasi pré-révolutionnaire des conditions d’application des conventions de mécénat.

D’aucuns accablent peut-être un peu vite cet homme dont l’histoire retiendra sûrement qu’il a fait tant et tant pour l’économie, l’image de notre pays, et l’amitié franco-japonaise.

N’oublions pas non plus, ce serait vraiment trop injuste, tout ce que Carlos a fait pour donner ses lettres de noblesse au mécénat d’entreprise dans notre département ministériel. Nous ne mesurons certainement pas encore ce qu’il aura apporté à la « loi Aillagon » – sur le mécénat – dont on a fêté, plus modestement c’est vrai, le 15ème anniversaire en 2018 et, ne soyons pas ingrats, à la renommée universelle du plus beau des Châteaux.

La justice passera sûrement, et personne n’ose croire qu’elle soit magnanime avec les puissants. En attendant, et tandis que les médias sont passés à autre chose, au ministère et à Versailles c’est silence radio. L’art d’insonoriser une salle de bal par trop bruyante n’a d’égal que celui d’étouffer les affaires.

NB : Et depuis 2014, les personnels du Ministère attendent la publication d’un arrêté qui vise à revaloriser le taux des heures mécénat…

Paris, le 6 mars 2019