Rassemblement 10 juin : intervention CGT-Culture

Le service public de la culture en devenir !

Les salaires

Le travail et les emplois

Chers collègues, chers camarades,

Oui de l’argent il y en a

Vingt et un groupes du CAC 40 ont battu leurs records de profits en 2021. Ils ont réalisé un bénéfice cumulé de centre trente milliards d’euros, soit 71% de plus qu’en 2019. Les propositions de dividendes s’élèvent à cinquante-quatre milliards d’euros. Et comme si de rien n’était, le robinet des aides publiques aux entreprises sans conditions sociales, écologiques ou fiscales coule à flots avec notamment le « Plan France 2030 » et ses 34 milliards d’argent public.

A une toute autre échelle, 14 milliards d’euros ont contribué à sauver le secteur culturel durant la crise sanitaire. Donc de l’argent il y en a !

Plus d’argent pour le capital, moins pour le travail

Pour autant, concomitamment, les personnels et le ministère de la Culture font l’objet de politique d’austérité très nocives depuis vingt ans. Le catéchisme des libéraux est connu : marchandisation, éclatement du ministère, réorganisations, abandons de missions, détérioration du service rendu au public, dégradation des conditions de travail, perte de sens du travail, suppressions d’emplois et gel historique des salaires ; la coupe est pleine !

A l’échelle nationale et au-delà du ministère, ce sont des milliards d’euros d’économies qui ont été faites non seulement sur le dos des droits des travailleurs, du développement des services publics et des droits des citoyens mais aussi sur celui de la société et ceci uniquement pour le profit d’une poignée.

Une société sous tension

La démocratie politique, et ses apprentis sorciers dont nous voyons tous les jours comment ils galvaudent l’intérêt général et le principe de participation, n’en est pas sortie grandie ; la crise de représentation est durable et le niveau d’abstention aux dernières élections en est une manifestation. La société est amochée, fracturée et constamment sous tension ; mais elle vit, se bat, a de fortes exigences de justice sociale et de participation à construire un monde respectueux de l’humanité et de la planète.

Les services publics appartiennent à la Nation

Faut-il rappeler ici que les services publics appartiennent à la Nation, qu’ils sont un bien commun, qu’ils permettent de faire société, de consolider les solidarités entre tous et de satisfaire les besoins sociaux du plus grand nombre, quel que soit son territoire, son genre, son âge ou son origine.

Le pouvoir d’achat : on lâche rien !

Ces politiques d’austérité sont ciblées ; ce sont près de 25 % de pertes de pouvoir d’achat mensuelles sur la rémunération d’un agent public depuis 2000 ; près de 14% depuis 2010.

C’est pourquoi la Cgt Fonction publique exige le dégel d’au moins 10% de la valeur du point d’indice dès maintenant et non aux calendes grecques ! C’est ça l’égalité de traitement !

L’égalité de traitement est un combat

Le rattrapage indemnitaire revendiqué par la Cgt-Culture pour les titulaires a commencé à porter ses fruits. En cinq ans, le socle de l’indemnité IFSE d’un agent de catégorie C est passé de 1800 à 4600 euros par an. Un agent de catégorie B touche un socle au moins de 6200 euros par an et pour les A, celui-ci commence à 9000 euros.

C’est toujours ça qui n’ira pas dans les poches du patronat et des actionnaires !

Cependant, des inégalités persistent entre les agents, en fonction de leur affectation, filière et corps, le ministère se refusant à mettre en œuvre une politique rigoureuse d’égalité de traitement et à abonder en crédits les établissements sous sa tutelle au prétexte d’autonomie de gestion et d’un modèle économique agité comme un fétiche et pourtant à bout de souffle.  

Marges de manœuvres managériales opaques

Les marges de manœuvres managériales très opaques que sont les promotions, le complément indemnitaire annuel ou CIA, la modulation de l’IFSE à la discrétion totale de la hiérarchie accroissent les inégalités salariales au prétexte d’un management, que nous qualifierons de post moderne, basé sur des pratiques archaïques, la performance individuelle, l’individualisation des rémunérations, l’isolement des travailleurs, l’hyper-verticalité de la hiérarchie rendant un peu plus concrètes et désagréables les politiques d’austérité budgétaire.

La Cgt revendique :

  • Des grilles salariales revalorisées tenant compte de la qualification des agents, de leur ancienneté et expertise ;
  • L’avis des commissions administratives paritaires en matière de promotion sur la base de critères transparents et fondés sur l’ancienneté ;
  • La suppression de toute modulation individuelle en matière indemnitaire ;
  • La priorité aux mesures collectives et transparentes ;

Décrochage salarial des contractuels

La situation est plus dégradée ; certains sont sans cadre de gestion, à la merci d’une négociation de gré à gré de leur rémunération avec leur employeur, d’autres bénéficient du cadre de gestion Albanel, ou d’un cadre de gestion propre à l’établissement où ils travaillent.

Sur la base du principe « à travail égal, salaire égal » et pour ne pas mettre en concurrence les agents, le cadre de gestion Albanel a été mis en place en 2010. Faute de revalorisation de la grille Albanel, la Cgt-culture dénonce un décrochage important pour les agents contractuels de catégorie C équivalent à 4600 euros par an par rapport à un fonctionnaire. Il est de 3600 euros par an pour un agent en catégorie B et de 560 euros par an pour un agent en catégorie A.

La Cgt-culture revendique :

  • La revalorisation des cadres de gestion des contractuels sur le principe « à travail égal, salaire égal» ;
  • L’extension du cadre de gestion Albanel à l’ensemble des contractuels qui n’en bénéficient pas.

Eradiquer la pauvreté au ministère de la Culture

Enfin, des milliers de contractuels sont payés à un taux horaire sans aucune référence à la valeur du point d’indice. Ce sont des précaires occupant des besoins temporaires avec des quotités de travail souvent inférieures à un temps complet. La rémunération est très inférieure au SMIC. Ce sont essentiellement des femmes.

Sans relâche, la Cgt exige une rémunération en référence au point d’indice majoré pour ces travailleurs afin de bénéficier de l’indemnité de résidence et du supplément familial de traitement, comme tout agent public a droit. C’est ça aussi l’égalité de traitement. A titre d’exemple, pour un agent avec deux enfants travaillant à Paris, cela équivaudrait à un SMIC brut de plus à la fin de l’année.

Le 8 juin, l’administration avait enfin un mandat du Cabinet de la ministre pour proposer une mise en œuvre de la réforme de l’indiciarisation des rémunérations mais seulement au 1er janvier 2023. Là encore, la Cgt a dénoncé un décrochage de plus de 460 euros par mois entre un contractuel et un titulaire de catégorie C. Pour toute réponse, le ministère dit ne pas avoir assez de crédits, c’est comme ça et pas autrement et qu’il n’y aura pas d’ouverture de négociation sur ce dossier, alors que la Cgt l’avait demandé. Nous allons nous battre pour éradiquer toute forme de pauvreté dans ce ministère et nous gagnerons parce que cette revendication est juste et digne.   

Un « nouveau » gouvernement : c’est loupé !

Si la nouvelle ministre de la Culture voulait faire la démonstration de défendre les femmes, les travailleurs pauvres de ce ministère, c’est loupé !

Si Macron saison 2 voulait faire la démonstration d’un changement de méthode en termes de dialogue, c’est loupé aussi !

Le travail abîmé

Attaquer les salaires comme le fait ce gouvernement c’est attaquer le travail.

Défendre nos salaires comme nous le faisons, c’est avant tout redonner toute sa place au travail et aux valeurs du service public que nous portons.

Oui, la perte de sens au travail touche tous les agents, y compris la hiérarchie ; les raisons sont multifactorielles :

  • L’éclatement du ministère construit des clôtures dans la conception et la mise en œuvre des politiques, et empêche leur cohérence nationale ;
  • Le tableau Excel fait des ravages dans la conduite et le pilotage des politiques publiques culturelles, le service rendu au public et les conditions de travail ;
  • L’absence de coopérations entre administrations et partenaires institutionnels ne permet pas de construire ensemble des stratégies culturelles favorisant le renouvellement et l’adaptation des politiques publiques au besoin de Culture du plus grand nombre ;
  • L’absence de lien solide avec la société en constante mutation instille durablement un décrochage des politiques ministérielles et ne favorise pas la participation de nos concitoyens à la Culture ;
  • La multiplication des outils numériques et la dématérialisation du travail épuisent les travailleurs et éloignent du service public culturel des usagers ;
  • Les verticalités hiérarchiques obèrent toute forme de coopération et d’intelligence collective ;
  • La marchandisation et l’externalisation mettent en concurrence les travailleurs ;
  • L’utilisation outrancière de la messagerie électronique isole les travailleurs ;

La crise sanitaire est souvent invoquée mais le mal ne date pas de mars 2020.

La centralité du travail

Oui la centralité du travail est une revendication érigée en principe pour la Cgt. Nous revendiquons que les travailleurs du ministère se réapproprient leur travail et soient encouragés à œuvrer ensemble dans des coopérations renouvelées et horizontales aidés en cela par une hiérarchie plus visionnaire que gestionnaire et en capacité de définir des priorités utiles et réalisables au service de tous les concitoyens et de la Culture.

Etre utile et bien travaillé est la légitime obsession de tout travailleur !

Coopération, service public et Démocratie

Renouveler les coopérations c’est tout simplement les autoriser. Rendons cela possible en proposant que chaque collectif de travail puisse se réunir sans sa hiérarchie trois à cinq heures par trimestre, par exemple, pour débattre librement du travail. Proposons dans un autre temps des échanges similaires avec la hiérarchie pour la convaincre, s’il en était besoin, de l’utilité de ces échanges.

Mais la participation des personnels ne doit pas s’arrêter là. Elle doit être encouragée et protégée pour permettre une meilleure construction des politiques culturelles. Elle doit se poursuivre avec les acteurs institutionnels de la Culture, les professionnels, les artistes et les associations. Les usagers aussi. Notre service public n’est pas assez ouvert et démocratique dans son approche, nous ne travaillons pas bien avec nos concitoyens.  

Une expertise internationalement reconnue mais méprisée par la rue de Valois

Alors que le travail et l’expertise des personnels du ministère dans les domaines de la démocratie culturelle, la protection et la mise en valeur du patrimoine, le soutien à la création artistique, la recherche, l’enseignement supérieur culture, les métiers d’art, le développement territorial, la lecture sont reconnus au-delà du ministère et même au-delà du territoire national, comment expliquer de telles entraves, pour ne pas dire un tel déni, au sein même du ministère vis-à-vis du travail des personnels ?

Oui l’expertise des personnels du ministère est de très haut niveau et n’est en rien le fruit du hasard. Elle est le résultat d’hommes et de femmes engagés dans leur mission et d’une politique et d’une stratégie certes anciennes mais qui ont fait leurs preuves. Assurément cette politique est exigeante. Elle nécessite une politique des personnels conduite avec une vision stratégique ministérielle des carrières, des emplois et des métiers.

Un ministère utile à la Culture, au monde de la Culture et à nos concitoyens

Ce ministère est technique et doit le rester au risque de perdre son âme, sa raison d’exister et sa manière d’être, et au risque de ne plus être utile à la Culture, au monde de la Culture et à nos concitoyens.

C’est pourquoi, la Cgt-culture revendique :

  • Le maintien et le développement du réseau national des Directions régionales des affaires culturelles, des services à compétence nationale et des établissements publics dont les expertises sont reconnues et indispensables à la mise en œuvre des politiques dans les territoires ;
  • Une stratégie ministérielle de développement de l’expertise publique professionnelle au travers une politique de maintien de l’emploi public, de la préservation des statuts particuliers et des carrières adaptée à cet enjeu ;
  • Le recensement des besoins humains sur l’ensemble du ministère ;
  • L’anticipation des départs à la retraite par de nouveaux recrutements et la garantie des savoir-faire par leur transmission ;
  • L’ouverture de postes autant que nécessaire et l’organisation tous les deux ans de concours pour chaque corps du ministère avec liste complémentaire valable deux ans ;
  • Un plan de la résorption de la précarité ;
  • Un repyramidage catégoriel pour débloquer les carrières des agents ;
  • Des plans de formations tenant compte du caractère technique des missions et des métiers et de la réalité du travail ;
  • La ré internalisation des missions publiques notamment celles d’expertise, d’évaluation et d’audit dans l’administration.

Tous ensemble pour gagner

Nous comptons bien porter ces revendications devant les personnels pour en débattre et les partager, pour gagner un ministère au service de la Culture et de l’émancipation de nos concitoyens. Durant les cinq prochaines années, nous savons ce qu’il nous attend ; ne nous laissons pas faire ; toute occasion pour amplifier le rapport de force doit être prise, y compris les élections législatives.

Tous ensemble, changeons le travail et gagnons plus de justice sociale et d’abord le dégel du point d’indice. Nous n’obtiendrons que ce que nous aurons été chercher par le rapport de force et le vote dans les urnes notamment aux élections professionnelles de décembre prochain.

Tous ensemble, continuons à construire le ministère de la culture qui ne se réalisera que dans l’utilité qu’il apportera à toute la société et à son développement, que nous voudrions plus harmonieux, plus démocratique et surtout plus culturel.

Depuis son arrivée, la ministre n’a quasiment rien dit de ce qu’elle veut faire du ministère et de la Culture. Ne soyons pas passifs, ne les laissons pas faire, imposons le débat, échangeons les idées, promouvons la participation des travailleurs et des usagers à la construction de l’avenir, comme les camarades de la BnF l’ont fait ; retrouvons ensemble notre pouvoir d’agir à imposer d’autres choix.

Notre capacité à nous faire confiance, tous ensemble, à faire ministère, à construire le rapport de force, pour porter avec ambition des politiques publiques au service de la participation de tous nos concitoyens à la Culture et rendre possible de nouveaux imaginaires est intacte. Notre capacité a exigé la justice sociale aussi.

Alors dimanche, n’oubliez pas d’aller voter ; et après allez danser, encore !

Vive la Cgt-Culture

Vive la Culture

Et que vive le ministère de la Culture !

Colonnes de Buren, 10 juin 2022

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