Monuments Nationaux : L’envers du décor

Le lieu que vous allez visiter aujourd’hui fait partie des 96 monuments
historiques gérés par le Centre des Monuments Nationaux (CMN),

un établissement public placé sous la tutelle du Ministère de la Culture et
de la Communication.

Plongé dans la tourmente de la «RGPP» – Révision Générale des Politiques
Publiques – ce patrimoine subit de plein fouet les conséquences
de cette politique dévastatrice : en terme de suppressions d’emplois,
de programmation culturelle ainsi que toutes les dérives
commerciales qu’induit la réduction drastique des moyens financiers
et humains.
En effet, depuis maintenant plus de trois ans, la politique
gouvernementale contraint tous les services publics, et ceux de la
Culture en particulier, à toujours moins d’agents pour les servir, à toujours
moins d’Etat et moins de dépenses publiques.
Les personnels du Centre des Monuments Nationaux s’adressent
aujourd’hui à vous afin de vous informer de l’urgence de la situation
quant à l’avenir du patrimoine national qu’ils défendent et
l’avenir de leurs missions publiques.

Sous-effectif et précarité. L’absence de nouveaux recrutements et les
suppressions de postes ont pour conséquence un sous-effectif endémique
ne pouvant qu’entrainer une précarité de l’emploi grandissante. Mais
aussi une nette dégradation des conditions de travail de tous les personnels
avec la remise en cause de leurs droits, un appauvrissement de leurs
métiers et, en bout de course, la privatisation de pans entiers du service
public culturel dont ils garantissent pourtant l’existence au CMN : activités
pédagogiques, accueil et sécurité des personnes, sûreté et préservation
des monuments, entretien des jardins…

Baisse des moyens financiers. La réduction voire la suppression des
crédits d’action culturelle et pédagogique dans certains monuments, relève
de décisions politiques totalement arbitraires et incohérentes avec
le principe d’un réseau national basé sur la juste répartition des moyens
entre tous les monuments.

On pourra toujours arguer d’un programme culturel riche de plus d’une
centaine d’événements en 2011 mais c’est au bout du compte un trompe
l’oeil qui ne trompe personne ! Cette orientation politique est dangereuse
: C’est le règne des têtes d’affiche, des effets de mode, des actions de
prestige ponctuelles, du divertissement, au détriment d’une politique
culturelle de progrès ouverte à tous et menée dans un réel esprit de service
public.

Dérives commerciales. Les dérives actuelles du CMN mettent à mal nos
missions pricincipales de conservation des monuments et d’accueil du
public. En effet, des arbitrages sont pris en faveur d’un développement
économique tous azimuts, de rentabilité commerciale immédiate, de politique
de locations d’espaces excessive au détriment de la conservation et
du respect des monuments (dégradations…) et de marketing touristique
outrancier sans aucun rapport avec l’histoire ni l’esthétique des lieux. Et
que dire de l’implantation de restaurants, d’hôtels et de gîtes pour touristes
d’affaire et de luxe dans certains sites déjà retenus pour cette nouvelle
« activité » ?!!

«Décentralisation.» Le projet de loi relatif au patrimoine monumental
de l’Etat, doit être examiné et voté à l’Assemblée Nationale d’ici début
juillet. Cette loi qui prévoit le transfert à titre gratuit des monuments
nationaux aux collectivités territoriales représente une réelle menace sur
l’avenir de notre établissement. En effet, de par sa diversité et sa richesse,
le CMN constitue un réseau qui s’inscrit pleinement dans le maillage territorial
qui doit être le relais du service public culturel au sein de nos régions
et au plus près de nos concitoyens. Par ailleurs, ceci n’exclut en rien
la complémentarité de l’action entre le CMN et les collectivités au travers
d’actions communes et de partenariats. De plus, sous couvert de renforcer
le cadre législatif, cette loi permettra de décomplexer, voire d’encourager
la vente de monuments historiques, comme cela s’est fait pour l’Hôtel de
la Marine. L’inaliénabilité des bâtiments et site classés est donc en question.
Enfin, qu’en sera-t-il du sort des personnels au moment des transferts
? La loi ne donne aucune garantie quant à leur devenir.

Management et souffrance au travail. Comme tant d’autres établissements
publics ou entreprises de notre pays, les personnels du CMN
connaissent les effets ravageurs d’une politique de management brutale
et guidée par les seuls critères de rentabilité. Depuis plus de deux ans les
organisations syndicales de l’établissement, n’ont eu de cesse d’alerter et
de dénoncer cette situation. Le Ministère de la Culture semble avoir pris
les mesures de la gravité des évènements et vient d’engager une inspection
dont le rapport sera remis le 30 juin. Sans présager des résultats de
cette enquête, nous espérons que des mesures concrètes seront prises ; il
en va de la santé des personnels.

Les personnels des monuments sont tout à fait conscients de tous ces dangers, ils ne
cessent d’exprimer leurs inquiétudes et vous l’expriment encore aujourd’hui.

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