Jamais un communiqué de notre section syndicale CGT-Culture du C2RMF, n’a eu autant d’effet. Il a fait réagir de nombreux collègues, quelques uns d’entre vous ont trouvé ce communiqué réducteur, d’autres pas assez détaillé, certains enfin ont vu ces auteurs soit comme des manipulateurs soit comme des manipulés. Certains collègues ont mal pris le dernier communiqué, ils jugent qu’ils dévalorisent la restauration, d’autres qu’il réduit le rôle du CNRS.
Visiblement, il y a de quoi faire un colloque sur la recherche et la restauration sur le patrimoine en France. Ah! Si Madame NAFFAH voulait vous écouter !
La première critique de notre communiqué portait sur la dévalorisation de la restauration.
Un petit rappel, tous les rédacteurs des rapports ont dit que le projet du CNCP est une occasion pour de faire évoluer la restauration, depuis le premier rapport. Oralement, le premier rédacteur, Monsieur Erlande-Brandenburg l’a avancé en 2007 dans l’auditorium du C2RMF, et cela a été confirmé par Monsieur Suzzarelli1. et reprit par Monsieur Dalbera2. Les responsables du Louvre et ceux du C2RMF l’ont répété dans toutes leur réunion, sauf quand ils étaient face à leur collègues de l’INP.
La CGT-Culture n’a fait que reprendre cet élément et a conseillé aux différents porteurs et rapporteurs de profiter de ce projet pour développer la recherche sur la restauration3.
Il est peut-être temps dix ans après la fusion entre le LRMF et le SRMF, vingt ans après celle entre le Service de restauration des peintures des musées nationaux, le Service de restauration des musées classés et contrôlés et le Service des travaux de restauration de la Direction des musées de France, de faire un premier bilan.
Tous les ateliers ne fonctionnent pas de la même façon. Cela est du en grande partie à leurs histoires différentes. Il est clair que la filière de peinture constituée d’un très grand nombre de restaurateurs libéraux et la filière des arts graphiques formé d’un noyau restreint de restaurateurs fonctionnaires n’ont pas la même approche ni le même type de relations vis à vis des autres départements et des musées.
Il y a plus de dix ans, les restaurateurs libéraux ont été menacés de ne plus travailler dans nos ateliers s’ils s’organisaient en associations. Du coup, lors de la réforme des marchés publics ils se retrouvent désavantager pour candidater sur des appels d’offres, face à des grosses structures étrangères !
Cette même administration, il y a environ 20 ans, a bureaucratisé nos ateliers et écartée progressivement de la gestion des ateliers les personnels publics et privés de la restauration. Comment ? En mettant un conservateur entre les restaurateurs et l’ensemble des autres intervenants interne et/ou externe, chercheurs et responsables de collections. La présence de restaurateurs publics permets d’atténuer cette gestion bureaucratique. Un chercheur du C2RMF dispose dans ce cas d’interlocuteurs permanents (restaurateur ou chef d’atelier du C2RMF), sans avoir à faire de demande et passer par le conservateur.
Ce rapport direct, confraternel, entre personnels de différents départements est le quotidien d’un certain nombre de collègues. « Apparemment, les ateliers épargnés par ces procédures bureaucratiques commencent à se plaindre de la généralisation de ces procédures ».
Sans rentrer dans l’éternel débat sur les mérites relatifs des différents Arts, le fait est que la peinture en France a un prestige inégalé, illustré par la place prépondérante du département des peintures. Il ne faudrait toutefois pas que la vision du C2RMF par les porteurs du projet se réduise au seul atelier de peinture.
Quand on dit « hisser la restauration au niveau de la recherche », on veut dire « hisser la recherche en restauration au niveau de l’autre,
Nous pensons que l’administration ne distingue pas les métiers. Le restaurateur restaure, le physico-chimiste analyse, et le conservateur interprète ces deux parties et les contextualise dans un cadre d’histoire de l’art avec son œil et son esprit critique. L’ensemble de ces métiers, dans leurs domaines respectifs, participent à la transmission entre l’artiste/artisant et le public.
La seconde critique de notre texte portait sur le rôle du CNRS.
Notre texte effectivement n’évoquait le CNRS que sur le plan de l’apport en personnel. Il est évident que son rôle ne s’arrête pas là. L’UMR171 gère ainsi le budget apporté par les programmes de recherche, nationaux, européens et internationaux pour environ 800 K€ cette année alors que l’année dernière il est aux alentours de 500 K€. Si un établissement public pourrait légalement gérer en propre de tels budgets, il faut toutefois noter quelques bémols. Le rattachement à une unité mixte est toujours un plus lors des réponses aux appels d’offre puisque sa création a été validée par le CNRS et donc quelque part labellisée par la plus grande institution scientifique au monde4. De plus, c’est le métier du CNRS de gérer des budgets de recherche, il dispose de services et d’outils adaptés que ne possède pas le ministère de la Culture, que ce soit au niveau des formations que du conseil (risque chimique, radiologique, protection des données et du patrimoine scientifique, mission à l’étranger, entre autres).
Le bâtiment coûte à l’État 900K€ par an. Pour réaliser le même centre, l’État doit mettre au moins de 40 millions sur la table. En période de crise économique c’est irresponsable et indécent ! Rappelons-le, ce projet a pour objet initial de mettre en place des réserves pour les musées parisiens situés dans la zone inondable !
L’analyse du rapport d’activité de 2008 du C2RMF, montre que sa délocalisation est une catastrophe pour le patrimoine. Il faut savoir que 51% des demandes émanent du musée du Louvre, dont la majorité sont des œuvres de expositions, et la tendance de cette année est la même selon nos estimations.
Maintenant, dans quelques jours la directrice quittera le C2RMF comme à son arrivée sur la pointe des pieds. Sa succession semble toujours floue. Nous ne pouvons que regretter une telle désinvolture de la part du ministère. Cette vacance à la tête du C2RMF s’ajoute au flou quant à l’avenir du Centre. Tant que dureront ces conditions, nous demandons à ce qu’aucune décision impliquant durablement l’avenir du C2RMF et de ses personnels ne soit prise.
Bien que le musée du Louvre représente plus que la moitié de l’activité du Centre de recherches et de restauration des musées de France, est ce que cela lui donne le droit de réfléchir de proposer et de trancher pour l’ensemble des musées de France ? Et l’ensemble des départements patrimoniaux ?
Quelles sont les activités du C2RMF ? Que fait-on au C2RMF ? De quoi les collections du Louvre ont-elles besoin à proximité ? Quelles sont les activités qui doivent rester au Louvre ? Quelles sont les activités que doit développer le CNCP ? Et pour quels musées ? Et avec qui, quels personnels ? Est ce que c’est le Louvre qui bonifie le C2RMF où c’est l’inverse ? Une fois séparé ça pourra continuer ? Toutes ces questions restent posées et le Ministre doit trancher sur un rapport que tous le Monde à le droit de lire sauf les agents du C2RMF.
Les rapporteurs et les porteurs du projet ont défini un cadre et sans se soucier des conséquences, ils comptent faire entrer tout le monde à l’intérieur.
Nous demandons un moratoire sur le CNCP afin d’ouvrir une vraie réflexion sur la politique nationale en recherche et restauration des œuvres du patrimoine avec l’ensemble des acteurs, à laquelle la CGT-Culture prendra toute sa part.
Fichier(s) joint(s)
- pdf/le_CNCP_le_flou_artistique.pdf - 112 Ko