La ministre dans nos cartons, Ou : quand la patronne déménage

La ministre ne part pas en vacances avec nous. D’ailleurs, elle ne veut déjà pas travailler près de nous. Mais ça peut s’arranger. Une bonne gueulante, une femme qui s’impose et qui tonne du haut de son perchoir en conseil des ministres qu’on ne touchera pas à ses agents et à leur confort (?) largement mérité. Pas d’exil pour les braves, vous savez, tous ces petits hommes, toutes ces bonnes femmes d’administrations centrales qui se lèvent le matin avec pour seule ambition de défendre le service public. Plus de 1 000 humains qui se consacrent, pour vivre – et dans toutes les acceptations du terme – à la transmission universelle de la culture. C’est beau un peuple de travailleurs avec une mission de partages des biens et des droits. Mais la Ministre oublie les revers de la bataille. Bien que parfois il y ait quelques morts au combat (les oubliés des instances ou les serviteurs bâillonnés), le gros des forces n’envisage pas de baisser les bras devant les incontinences culturelles de l’État.

La Ministre a déjà anticipé volontairement le déménagement en lançant la procédure de vente du site Pyramides. Ce qui est très différent de la fin de bail du site Beaubourg. Son geste est fort : elle gouverne bien sans nous laisser, comme nous l’avions demandé depuis longtemps, ce temps de réflexions sur le devenir, non seulement de sites administratifs, mais de la culture même en France.

Entre choix de débats constructifs et violences des faits, le cabinet donne dans l’accomplissement de ses faiblesses. Vive le Peuple, mais que, surtout, la Princesse demeure en son château ! Elle a compris, la Ministre, ce que sont les ressources humaines ? Ce sont NOUS, dans le chaos des politiques incertaines et des caprices des dieux temporaires. Vivent les expositions de quinquennat : mais ce sont nous qui sommes les plus exposés aux obsessions de communication à défaut de construction d’un avenir culturel. La culture du travail et de la solidarité : peut-être est-ce cela, en priorité, qu’il nous faudrait lui apprendre . Un maître et ses serviteurs : OK. Mais nous voulons du pain au levain de nos croyances sociales. Nous voulons un chef frondeur qui regarde aussi bien ses agents que les caprices de ses lignes de crédits, et qui n’oublierait pas la puissance publique et le droit culturel qui s’en va nous échappant pour des pouvoirs locaux qu’on est en train de rendre incontrôlables.

Depuis le temps que nous travaillons tous pour que la culture soit un rempart à la démagogie et à la folie des hommes, quels moyens a-t-on trouvés pour nous rassembler autour d’un stratège pour encore mieux nous enthousiasmer ? Madame la Ministre, cessez-donc, comme nombre de vos prédécesseurs, d’ailleurs, de nous considérer depuis vos dorures conservatrices et frelatées, participez à l’échange et osez tomber au niveau de vos troupes. Osez, oui, osez, demeurer auprès de nous dans cette bataille de proximité où nous savons tous très bien que si vous voulez concentrer toutes nos forces, nous ne pouvons nous désunir et laisser partir en éclats vos collaborateurs qui ne demandent que la proximité de vos savoirs et de vos responsabilités de chef.

Nous sommes fatigués que les choses de la culture en mode ministère se dissolvent dans la pensée unique, l’immédiateté obsolescente et la médiocrité sacralisées.

Apprenez à dire NON, comme vous devriez croire au pouvoir de la culture, placée entre vos mains, et que vous n’avez pas autorité à décevoir car elle ne vous appartient pas. La culture, madame la Ministre, elle se partage, et, en particulier, avec ceux qui sont en première ligne, c’est à dire NOUS, vos agents.


Signez la pétition contre le projet délocalisation de l’administration centrale du ministère de la Culture et de la Communication, faites-la connaître, faites-la circuler, faites-la signer ! :

http://www.petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=P2015N48070

Paris, le 13 octobre 2015