Déclaration liminaire au Comité Technique du 6 mars 2012

Madame la Présidente,

Dans la continuité de la lutte engagée depuis bientôt six mois, les représentants du personnel au Comité Technique du Centre des Monuments Nationaux ont décidé de ne pas siéger aujourd’hui.

Ce Comité a été convoqué sur un ordre du jour pléthorique et quelle surprise n’avons nous pas eu en y découvrant les 75 fiches métiers de l’établissement ! Fiches que nous n’avons cessé de réclamer tout au long des négociations sur le statut des contractuels et que l’administration nous a systématiquement refusées sous des prétextes divers et variés. Bien que vous ayez invité les représentants du personnel le 23 février dernier à une réunion « de préparation du CT », nous ne pouvons que regretter une fois de plus votre absence de véritable volonté de dialoguer. Cette réunion comme d’ailleurs ce CT ressemblent plus à un simulacre, destiné à vous justifier auprès de la tutelle. En effet, nous savons que ces fiches ont été élaborées dans la précipitation et sans réelle concertation. Au siège, lorsqu’ils en ont eu connaissance, les personnels ont tout juste été invités à apporter leurs remarques, à chaud, sans délais de réflexion ni réel travail sur le fond. Même chose dans les monuments où bien souvent les agents n’ont même pas été informés de la rédaction de ces fiches. Par ailleurs l’administration n’a même pas pris la peine de faire un retour en direction de ces mêmes agents.

A lui seul, ce dossier, lourd de conséquences pour l’avenir des personnels, aurait mérité le temps d’une large concertation dans le cadre de la négociation sur le statut. Cette seule question pourrait d’ailleurs faire l’objet de toute la séance d’aujourd’hui et pourtant vous n’hésitez pas à inscrire à l’ordre du jour d’autre points tout aussi primordiaux, qui n’ont, d’ailleurs pas non plus fait l’objet de la concertation que les agents étaient en droit d’attendre : vote du règlement intérieur du CT, réorganisation de la DMO, modifications des horaires d’ouverture de trois monuments, nouveau cadre de gestions des vacataires et des conférenciers (même si ces deux points ont été retirés au dernier moment), modalité d’application de deux nouvelles indemnités… autant de sujets qui auraient mérité un large débat dans le cadre de cette instance.

L’ordre du jour de cette séance est à lui seul un aveu du peu de cas que vous faites du dialogue social. Car au-delà des apparences, cette situation ne semble pas vous émouvoir, bien au contraire, vous avez profité de l’absence des représentants du personnel depuis le mois de septembre pour faire passer en force un certain nombre de mesures synonymes de recul pour les agents, au premier rang desquelles figure le nouveau statut des contractuels de l’établissement.

Par ailleurs, si l’établissement est toujours en crise, le contexte a tout de même sensiblement évolué.
Le rapport de l’IGAC nous a été transmis hier, dans une version expurgée conformément aux exigences de consultation de la CADA : un tiers du document a ainsi été occulté. Contrairement à ce que vous avez pu écrire dans la lettre que vous avez adressée au Monde, en réponse à l’article de Florence Evin « Monuments nationaux, personnels en péril », ce document n’avait été communiqué qu’à de très rares personnes au ministère et à vous-même, mais certainement pas aux organisations syndicales ; de même il est faux de dire, comme vous l’avez fait, que « les conclusions ont bien été rendues publiques et ont fait l’objet de discussions dans le cadre des instances paritaires » : l’avis de la CADA précise d’ailleurs que seule une synthèse a été présentée aux organisations syndicales le 5 octobre dernier.

Nous n’avons pas pu dans de si brefs délais assurer une lecture détaillée de ce rapport et de ses annexes. Nous notons qu’il reprend largement à son compte les constats de la médecine de prévention ainsi que les alertes que les représentants du personnel n’ont cessé d’émettre depuis plus de trois ans, malheureusement en vain. Le tableau qu’il dresse de la situation des agents du CMN, et même de celle de l’établissement, est particulièrement inquiétant.

Sa conclusion et ses préconisations ont été très largement supprimés. Pourquoi cet élément fondamental manque-t-il ? Pour respecter les recommandations de la CADA qui précisent que doivent être occultés « une appréciation ou un jugement de valeur sur une personne physique, ou facilement identifiable ». Comment dans ce cadre pourrions-nous raisonnablement examiner les mesures avancées? Nous refusons qu’une fois de plus des « solutions » nous soient imposées sans dialogue ni concertation, comme ce fut le cas lors du CHS spécial du 17 février 2010. La seule solution choisie alors par vous pour remédier à la souffrance au travail, l’intervention de Théâtre à la carte, ne fut suivie d’aucun effet (deux ans de perdus !) et depuis, la situation n’a cessé d’empirer, comme l’indique le rapport de l’IGAC.

Par ailleurs, ces mesures ne semblent pas toutes en totale adéquation avec les conclusions des rapporteurs de l’IGAC. Ces derniers indiquent notamment : « La mission [de l’IGAC] estime qu’un changement complet et immédiat de management est indispensable pour stopper la détérioration des conditions de travail de l’établissement qui doit impérativement éviter de se voir confronté à des situations individuelles aggravées. »

Le management est aussi mis en cause par le directeur général de l’établissement, qui, dans une note intitulée « Alerte sur la gravité du climat social et des risques professionnels » qu’il vous adressée le 30 mai dernier, soulignait que « sans une évolution significative du mode de management, l’établissement restera dans l’incapacité d’assumer l’essentiel de ses missions. ».

Dans votre lettre au Monde, vous déclariez que les « personnels ne sont pas en péril ». Vous semblez la seule à le penser aujourd’hui. Vous ajoutiez aussi : « ils savent qu’ils peuvent compter sur moi » : c’est peut-être là le problème…

Suite à ce constat accablant, comment pouvez-vous prétendre vouloir étendre les prérogatives de l’établissement sur la gestion des agents titulaires de l’État affectés dans les monuments ? Nous vous demandons donc de renoncer au transfert de gestion des agents titulaires. Cette demande nous la ferons également auprès du Ministre de la Culture et de la Communication.

Dans l’attente de la définition et de la mise en œuvre par le Ministère d’un réel plan d’action, conforme aux conclusions et aux préconisations du rapport de l’IGAC et en concertation avec les représentants du personnel, nous demandons :

 la suspension momentanée de toutes les instances paritaires ;

 la suspension de toutes les procédures disciplinaires ;

 la suspension de toutes les procédures de licenciement actuellement en cours ;

 la réouverture de négociation concernant le statut des contractuels de l’établissement.

En résumé, Madame la Présidente, êtes-vous prête à accepter le principe d’un moratoire ? Nous attendons votre réponse.

A cette question la Présidente du CMN a répondu par une fin de non recevoir.

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