Château de Rambouillet : Signal d’alarme pour un service public culturel d’avenir !

Château de Rambouillet : Signal d’alarme pour un service public culturel d’avenir !

Dans le cadre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail Nord-Ouest du CMN qui s’est tenu ce mardi 12 mars, les nouveaux horaires du château et du domaine de Rambouillet étaient présentés à l’ordre du jour.

Le SNMH-CGT a mis la direction de l’établissement devant ses responsabilités en lisant la déclaration suivante pour dénoncer les conditions de travail des agents de Rambouillet :

Riche d’une histoire séculaire remontant au 14ème siècle et ayant vu de grands moments historiques de notre pays comme l’abdication de Charles X en 1830 ou comme résidence présidentielle au 20ème siècle, le château de Rambouillet est un site majeur du Centre des monuments nationaux. C’est également un magnifique parc de 150 ha comprenant notamment deux œuvres majeures que sont la laiterie de la reine et la chaumière aux coquillages. Les serres du domaine permettent également de ne pas externaliser la production florale.

Pourtant, le château semble désormais livré à lui-même et ne fonctionner que sur un investissement sans faille des agents qui ont à cœur de porter un service public culturel de qualité auprès des visiteurs de ce domaine.

Malheureusement, force est de constater que la bonne volonté des agents ne suffit pas. C’est pourquoi aujourd’hui nous sommes amenés à nous prononcer sur le réaménagement des horaires et l’externalisation de l’ouverture et de la fermeture du parc.

Cela est le résultat d’un grave sous-effectif de la filière accueil et surveillance. En effet, les effectifs sont passés en moins de 20 ans de 19 agents d’accueil et de surveillance à à peine 11 aujourd’hui dont 2 sont en congé longue maladie et un autre en mi-temps thérapeutique, tous non remplacés par des contrats de type 6.4 prévus à cet effet. La filière jardins n’étant pas mieux lotie puisque de 18 agents en 2000 elle a fondu à 8. Depuis plusieurs années, les effectifs du site sont rognés pour en arriver à être réduits à peau de chagrin : en moins de 20 ans c’est près de 50% des titulaires qui n’ont pas été remplacés !!!

Non seulement le service rendu au public s’en voit dégradé car ce sont aussi les visiteurs qui en sont victimes par une offre culturelle amoindrie mais les premiers à en payer les frais ce sont les agents.

Car les agents vivent mal le sous-effectif structurel et l’appauvrissement de leurs missions auquel vous les condamnez et celui-ci a des conséquences :

  • sur la santé des agents par le report de charge,
  • par les sacrifices consentis par les équipes pour leurs prises de congés ou de formations avec ce que cela peut engendrer sur leurs vies personnelles et professionnelles ;
  • mais aussi sur la possibilité pour le service d’aménager des postes de travail pour des agents avec des invalidités reconnues,
  • sur le sens donné au service public avec si peu de moyens et le sentiment que l’établissement se désintéresse d’eux, ne les considère ni ne les reconnaît malgré un investissement sans faille.

Tout cela participe d’une dégradation grave des conditions de travail particulièrement en termes de risques psycho-sociaux.

Pour la sauvegarde des métiers et des savoirs du service jardin

Ce service comprend – pour couvrir les 150 ha et la production florale – 6 titulaires, 1 contractuel, 1 apprenti, 1 emploi avenir à venir. Il faudrait 8 titulaires supplémentaires pour répondre aux besoins que demande ce domaine. De plus, ce service ne bénéficie d’aucune enveloppe de vacations. Là encore dans ce domaine, les externalisations ont été massives et beaucoup de jardiniers considèrent que la majeure partie des travaux externalisés seraient mieux fait, et dans les règles de l’art des jardins historiques, s’ils étaient confiés à des jardiniers d’art.

Au total aujourd’hui, il ne reste que 90 jardiniers sur l’ensemble du ministère. A ce rythme, d’ici quelques années, il n’y aura plus personne.

Ce sont donc des savoir-faire uniques et leur transmission qui sont purement et simplement sacrifiés si le CMN et le ministère de la culture ne font rien pour rectifier la perte inestimable de ces métiers.

À l’heure où nous vivons l’ère anthropocène, cela serait un enjeu politique et un acte fort que de remettre ces métiers au cœur des missions du ministère de la culture. Il y a une appétence des publics pour ce sujet, il y a un devoir vis-à-vis des générations futures. Il y a un enjeu de sauvegarde prioritaire pour les derniers liens qu’il nous reste avec la nature, des gestes et des savoirs qui ont traversés les siècles. Ce patrimoine vert fait partie de notre culture et l’externalisation de ces missions ne saurait répondre à ces enjeux

Il y aurait tant à faire également au-delà des missions premières de la filière jardin, sur la médiation de ce patrimoine vert !

D’ici 2021, le château de Rambouillet connaîtra deux nouveaux départs à la retraite dans cette filière. Si vous ne réagissez pas dès aujourd’hui, la transmission des savoirs de ces deux agents sera perdue. Et cette transmission ne se fait pas du jour au lendemain notamment pour la production florale. Elle se fait sur deux voire trois ans. Vous avez là-dessus une responsabilité forte et immédiate.

Aujourd’hui donc, une question vous est posée ? Qu’envisagez-vous pour la filière des métiers d’art ? Les agents attendent des réponses et notamment de savoir si le président du CMN et le ministre de la culture souhaitent l’extinction de cette filière et des savoirs faire qui vont avec.

Pour le développement des missions culturelles au sein de la filière accueil-surveillance

A seulement 45 minutes de Paris, le château de Rambouillet connaît une sous-fréquentation par rapport à ce qu’une véritable politique culturelle et de communication pourrait développer. Ainsi, le château de Rambouillet en est réduit à refuser des groupes scolaires et des visiteurs faute d’effectifs ! Sans ces freins, le château accueillerait bien davantage que les 45.000 visiteurs annuels.

Les agents de la filière accueil-surveillance, malgré un fonctionnement acrobatique et des missions qui perdent au fil des ans de leur sens, sont des agents très investis, avec une connaissance des publics forte et ne demanderaient qu’à re-développer les visites commentées qui disparaissent et qui pourraient même s’enrichir de thématiques nouvelles si on leur en laissait l’opportunité.

Au-delà de l’enrichissement qu’apportent les visites commentées des agents aux visiteurs mais qui disparaissent, c’est aussi peu à peu un château vidé de ses collections qui est présenté aux visiteurs.

Comment alors s’étonner du mécontentement de ces derniers ? Les premiers à subir cette situation sont les agents en plus d’en être parfois tenus pour responsables. Les contraintes de valeurs y sont fortes. Sans compter une politique tarifaire inadéquate au regard de l’offre culturelle qui y est proposée, là encore facteur de tensions avec les visiteurs.

Avec la nouvelle organisation, on passe donc à une équipe unique. On réduit de facto, faute d’effectifs, les espaces de visite. Tout se concentre désormais sur le château et encore qu’une partie. Mais quelle surveillance pour le domaine ? Car si les missions prévoient la sécurité des collections, elles prévoient également celle des personnes.

Quant aux conditions de visites notamment de la laiterie cela devient tout simplement ubuesque puisque désormais le jardin autour de la laiterie sera en libre accès quand on sait que la laiterie se compose de deux pièces visibles de l’extérieur. Comment pouvez-vous mettre les agents dans une situation où ils devront empêcher les visiteurs dans le jardin de regarder à l’intérieur de la laiterie ? Clairement, vous ne donnez pas aux agents les moyens de travailler correctement.

À l’heure où des monuments connaissent une surfréquentation dégradant les conditions de travail mais également de visite, des monuments, comme celui du château de Rambouillet, pourraient être plus largement visités si l’on s’en donnait les moyens (effectifs, offres culturelles, plan de communication).

C’est pourquoi nous alertons aujourd’hui sur la situation de ce site dont les équipes ont le sentiment d’être totalement laissés à l’abandon et qui ne demandent qu’à répondre à une meilleure qualité de service public. Nous ne souhaiterions pas que la gestion de ce site fasse tache d’huile au CMN comme au ministère.

C’est pourquoi, il est urgent pour le château de Rambouillet :

  • D’ouvrir huit avis de vacance pour le service jardin.
  • D’ouvrir cinq avis de vacance pour le service accueil-surveillance.
  • D’ouvrir des concours pour ces deux filières sur l’ensemble du ministère pour répondre aux besoins.
  • De remplacer les agents partis du site par des contrats 6 quinquiès en attendant l’affectation définitive de fonctionnaires et les agents en arrêts maladie par des contrats 6 quater.
  • De prévoir une titularisation des métiers d’art dans le prochain plan Sauvadet prévu en 2020
  • De diligenter une visite CHSCT au château de Rambouillet.
  • D’initier une politique de ré-ameublement et d’enrichissement des collections pour le château.
  • De renforcer une offre culturelle en lien avec les agents.
  • De lancer une réflexion pour initier une médiation culturelle sur le patrimoine vert.
  • De revoir à la baisse la tarification tant que l’offre culturelle ne sera pas améliorée.

La directrice générale du CMN et présidente du CHSCT Nord-Ouest a répondu à notre déclaration :

En se disant globalement d’accord avec ce que nous venions de décrire et de porter. 

Elle reconnaît que l’offre culturelle n’est pas satisfaisante et que des choix ont dû être faits ne priorisant malheureusement pas le château de Rambouillet mais que des efforts seront mis en œuvre pour mieux valoriser la laiterie de la reine et la chaumière aux coquillages.

Des difficultés de présentation du château n’ont pas encore été tranchées comme notamment celle d’un ré ameublement d’une partie du château période 4ème République, Félix Faure… Une réflexion est donc toujours en cours concernant le projet scientifique et culturel pour synthétiser les différentes périodes du château et risque d’engendrer des coûts que le CMN n’est pas en capacité immédiate de prendre en charge.  Néanmoins, après des chantiers tels que le palais du Tau, le château de Rambouillet pourrait enfin devenir un des projets prioritaires du CMN. En attendant, une offre culturelle intermédiaire pourrait être mise en œuvre.

Il nous a été annoncé que deux avis de vacance pour l’accueil surveillance venaient de paraître et qu’il fallait voir si l’horaire unique du château permettrait une organisation du travail relançant des visites commentées. Elle reconnaît que la filière jardin est sinistrée, pour répondre à cette crise le CMN va lancer des formations, voire des formations qualifiantes au domaine de Saint-Cloud pour permettre la continuité de la transmission des savoirs. Ces formations devraient commencer fin 2019 ou début 2020 pour former les équipes du CMN. Une relance de la part du CMN a été faite au ministère pour des effectifs et des concours qui auront peut-être lieu en 2019 ou 2020. La CGT en fera de même encore une fois.

Il a été acté qu’une visite CHSCT aura lieu début mai.

Si nous ne pouvons que nous réjouir du – encore timide – regain d’intérêt de l’établissement pour Rambouillet et de la publication de 2 avis de vacance de poste d’agent d’accueil et de surveillance, il demeure cependant encore beaucoup trop d’incertitudes et de conditionnel dans les réponses apportées par la direction pour un château et un domaine qui a besoin d’un réel plan d’urgence.

C’est pourquoi nous restons vigilants et mobilisés aux côtés des agents pour gagner avec eux les effectifs et les moyens nécessaires à un service public culturel de qualité au château et au domaine de Rambouillet.

Paris, le 14 mars 2019.

Fichier(s) joint(s)