Interventions de la CGT-Culture et de la CGT-Spectacle
Paris, le 23 mai 2025

Depuis plusieurs mois les travailleurs et travailleuses de la culture se mobilisent contre les coupes budgétaires au travers de nombreuses assemblées générales, des rassemblements et manifestations.
Hier soir le 22 mai était organisé place de la République un grand rassemblement Cultures en lutte, avec concerts et prises de parole, où sont intervenu.e.s :
Des représentant.e.s d’organisations syndicales :
- CGT-Culture
- CGT-Spectacle et ses syndicats (SNAM, SFA)
- bureau confédéral de la CGT
- Sud Culture
- SYNDEAC
- SYNAVI
Des député.e.s :
- Clémentine Autain de Seine-Saint-Denis, (groupe Écologiste et social)
- Nicolas Sanu du Cher (PCF)
- Sophie Taillé-Polian du Val de Marne (groupe Écologiste et Social)
- Raphaël Arnault du Vaucluse (LFI)
Des artistes engagé.e.s :
- Fanfare
- Canard fait du rap
- Ismael Metis
- HK
- Soul people
- Artists against apartheid
- Oxfy
- Lilli Marche
- Flor Mata
- Nathalie Froehlich
- Coco
- Red
- La Mâle
- Planète boum boum
Intervention de la CGT-Culture
À l’heure où l’extrême-droite et ses idées gagnent du terrain dans le monde, en Europe et en France, nos politiques publiques culturelles n’ont pas de cap et tout leur écosystème est en danger. Alors que c’est plus que jamais le moment d’affirmer comme valeurs sociales la création artistique et la culture.
La subvention de l’intérêt général ne doit pas être considérée comme une dépense.
Et pourtant, la dette publique est dans la bouche de tous nos gouvernants, le principe d’austérité budgétaire imposée par le gouvernement impacte directement le secteur culturel, comme le montrent les coupes dans les collectivités avec une baisse totale de 65 millions d’euros. Et les récentes annulations de crédits viennent bien modifier le budget du ministère de la culture, quoiqu’en dise Rachida Dati. Elle a beau tenter d’imposer ses contrevérités avec sa trivialité et son mépris habituels, personne n’est dupe !
Ce qu’on peut clairement affirmer aujourd’hui, c’est que le budget actuel du ministère est en baisse d’environ 60 M€ par rapport au budget qui a été réalisé en 2024. Les programmes qui en pâtissent sont le Patrimoine, la Transmission et la démocratisation culturelle, la presse et les médias, le Livre et les industries culturelles. Et même si le programme pour la Création est affiché en hausse, ça ne vient absolument pas compenser la totalité de la baisse subie en 2024, à savoir moins 36 M€ par rapport à l’année précédente.
En termes de démocratisation culturelle, avant même l’annonce des nouvelles annulations de crédit, c’était déjà tout l’écosystème de notre territoire (associations et lieux, emplois, réseaux) qui était fragilisé par les coupes budgétaires des collectivités et celles des DRAC, qui sont les directions du ministère en région.
Et pour 2026, le gouvernement cherche encore à faire 40 milliards d’euros d’économie, ce qui va continuer d’impacter très fortement le secteur culturel partout en France.
Du côté du ministère, outre les baisses de budget, nous craignons de nouvelles suppressions de postes et des suppressions ou fusions d’établissements culturels. Car le projet de la ministre de la Fonction publique est de supprimer ou fusionner un tiers des agences ou opérateurs de l’état d’ici 2027.
On en a près de 80 au ministère (Le Cnap, le Louvre, la BnF, Versailles, l’Opéra national de Paris, le CNC, la Philharmonie, les théâtres nationaux, etc.). Sur ce point, le secrétaire général du ministère ne nous a rien répondu quand on l’a interpellé, ce qui n’augure, selon nous, rien de bon.
Il faut savoir que les établissements publics du ministère ont déjà perdu plus de 80 postes cette année, ce qui les contraint à embaucher de plus en plus de personnels de manière précaires.
Et, faute de subventions suffisantes de la part de l’État, ces établissements sont sans cesse contraints de trouver de l’argent (des ressources propres), en faisant quoi ?
En augmentant continuellement les billets d’entrée, en développant le mécénat, la privatisation d’espaces, l’usage de marques, le développement de filiales, de partenariats public-privé au travers de fondations. Et toute cette marchandisation se fait bien évidemment au détriment des missions premières de service public, au détriment des usagers, de vous, de nous.
Certains établissements (les plus visités) vont appliquer une mesure discriminatoire dès 2026 avec des tarifs plus élevés pour les visiteurs extra-européens : Versailles, le Louvre, Chambord, l’Opéra Garnier, L’arc de Triomphe ou la Conciergerie. D’autres sites appliqueront cette mesure en 2027.
Et quand on rappelait au secrétaire général qu’une des missions du ministère est bien de rendre accessibles au plus grand nombre les œuvres capitales de l’humanité, il nous rétorque que la politique de démocratisation culturelle ne s’adresse qu’aux ressortissants nationaux et que la tradition universaliste de la France ne va pas jusqu’au financement des ressortissants extra-européens !
Ah, elle sent bon la politique culturelle de Macron-Dati !
Face à toutes ces attaques, nous continuons d’exiger :
- une hausse massive des recettes de l’État et des collectivités
- la suppression des dépenses fiscales, dont le mécénat qui coûte aujourd’hui près de 800 millions d’euros aux contribuables
- l’abrogation de la réforme des retraites
- de véritables ambitions pour le service public culturel
- la consolidation des missions de démocratie et de démocratisation culturelles
- le renforcement des liens entre les politiques ministérielles et celles des collectivités
- l’arrêt des réorganisations libérales, comme celles, en cours, de l’enseignement supérieur culture et celle de l’audiovisuel public
- la gratuité d’accès des établissements publics à l’ensemble des populations
- le financement par le ministère des missions et de l’entretien des sites de tous ses opérateurs
- un plan massif de création d’emploi et la revalorisation salariale des personnels du ministère
- le respect de l’accord de 2023 relatif au régime de l’intermittence
- la continuité de revenus et l’accès à la sécurité sociale pour l’ensemble des travailleurs et travailleuses de la culture
Enseignement Supérieur Culture, c’est quoi ?
Ce sont des écoles nationales d’architecture, des écoles d’art, des Conservatoires, des écoles du Patrimoine, du spectacle vivant, du théâtre, du cirque, des marionnette… Ce sont 35 écoles et plus de 35 000 étudiantes et étudiants.
Ce sont aussi des milliers d’agent.e.s : enseignantes et enseignants, architectes, plasticiennes et plasticiens, musiciennes et musiciens, comédiennes et comédiens, régisseurs, chargés de documentation, administratifs, agentes et agents techniques et j’en oublie …
Nombreux sont les personnels des écoles qui subissent la précarité : on multiplie les CDD et les formes de précarités jetables, on recourt de nouveau et de plus en plus à la vacation voire à l’auto-entrepreneuriat sans droits ni protection sociale
Le salaire d’un grand nombre de ces agent.e.s, contractuel.le.s enseignant.e.s notamment, a stagné à un niveau scandaleusement bas pendant des décennies.
Derrière, ce que d’aucun nomment l’exception culturelle, il y a donc une exploitation cynique de la misère et de la précarité.
Pourtant ces travailleuses et travailleurs, comme les étudiant.e.s s’engagent pour la culture, pour l’art, pour leur Art, pour donner à nos cadres de vie des formes vivables des structures soutenables, pour proposer du monde une expression riche de créativité et de connaissance, qu’elle soit plastique, corporelle, matérielle, architecturale, mobilière, sonores ou visuelles…
La ministre Rachida Dati a ordonné serait plus juste, une réforme du pilotage de l’enseignement supérieur culture, cette réforme est menée avec une précipitation brutale car elle doit être achevée avant le départ de la ministre. Il semble en effet que sa principale motivation soit d’écrire une ligne supplémentaire sur le CV de celle qui présente sa candidature à la mairie de Paris. Cette réforme chaotique menace la cohésion et l’action des services qui élaborent et déploient les politiques d’enseignement accompagnent et soutiennent les établissements de l’enseignement supérieur culture.
Au-delà du bénéfice politique attendu, il s’agit, par ce projet, de faciliter et d’accélérer la réforme libérale de l’enseignement supérieur :
- Transfert des agent.e.s du ministère sur les écoles (avec pour conséquences moins de mobilité, surchauffe des fonctions RH, inégalités salariales à très court terme)
- Diminution des heures en face à face pédagogique
- Professionnalisation/alternance/apprentissage : Mais comment désormais trouver un stage lorsque les structures susceptibles de professionnaliser les étudiant.e.s disparaissent faute de financements : Comment va-t-on dorénavant se former dans les Pays de La Loire par exemple ?
- Injonction à trouver de l’argent à tout va pour compenser la baisse des financements publics
Ça n’est pas ce dont les écoles ont besoin. Ça n’est pas ce dont les étudiant.e.s ont besoin. Ça n’est pas ce que veulent les personnels de la culture.
Ce que nous voulons ce sont des emplois permanents, en nombre suffisants, à la hauteur de nos besoins et de nos missions.
Ce que nous voulons ce sont des salaires à la hauteur de notre engagement et permettant de vivre dignement de notre travail.
Ce que nous voulons ce sont des moyens pour la recherche.
Ce que nous voulons c’est garantir l’accès du plus grand nombre à un enseignement de qualité offrant des perspectives professionnelles après les diplômes, quel que soit l’origine sociale ou géographique des étudiant.e.s.
Ce que nous voulons c’est un enseignement émancipateur qui prépare des citoyen.ne.s libres et des esprits critiques à devenir architectes, plasticiennes et plasticiens, musiciennes et musiciens, comédiennes et comédiens
Mais ça n’est pas le projet des libéraux !
Les étudiant.e.s ont bien compris ces enjeux. Dans les écoles d’architecture, certain.e.s se rassemblent en assemblée générale, communiquent, se mobilisent, à Paris et en région
Cette fois, c’est à nous de marcher dans leur pas et suivre leur exemple. Nous devons nous mobiliser agent.e.s des écoles et agent.e.s du ministère pour que vive nos écoles et pour que vive nos services publics.
Intervention de la CGT-Spectacle
Ces dernières semaines, ces derniers mois, nous, travailleuses et travailleurs de la Culture, à travers Cultures en Lutte et l’intersyndicale dans le spectacle vivant subventionné multiplions les communications, les prises de parole, les actions et manifestations partout en France pour défendre nos outils de travail, nos métiers et une culture non marchande !
Nous ne faisons pas ça pour le plaisir mais pour dire haut et fort que les coupes budgétaires nous asphyxient ! Depuis deux années, nous ne comptons plus les millions qui manquent pour le bon financement des arts, de la Culture et de l’audiovisuel public.
Chaque semaine ces derniers mois, les coupes budgétaires arrivent de tous les côtés. ministère de la Culture, ministère de l’éducation nationale avec le gel la part collective du Pass Culture, Région (Ile de France / Pays de la Loire/ Auvergne Rhône Alpes et j’en passe), départements comme les Yvelines ou l’Hérault. Aucun territoire n’est épargné !
Ces coupes budgétaires ont des effets directs puisque moins d’argent public, c’est moins de spectacles moins de programmations moins d’expositions.
Nos professions se paupérisent ! Il est de plus en plus difficile de vivre de nos métiers ! Demandez autour de vous aux artistes, aux technicien.ne.s. Les agendas de travail sont vides. Demandez à tous.tes les professionnel.le.s, artistes auteur.ice.s, salarié.e.s, enseignant.e.s artistiques. Les salaires et nos rémunérations stagnent et partout les conditions de travail se détériorent. C’est inacceptable !
Un véritablement plan de licenciement est à l’œuvre et avec le silence complice de notre ministre de la Culture.
Ne nous trompons pas. Les coupes budgétaires contre nos secteurs comme pour les autres secteurs non marchands résultent de choix politiques dont est très largement comptable ce gouvernement !
Au lieu de consacrer des efforts pour l’éducation, la santé, la Culture il préfère verser des milliards d’argent public sur le secteur privé et nourrir notamment les multinationales !
Au lieu de refinancer les services publics essentiels et les collectivités locales, ce gouvernement fait le choix de nourrir l’industrie de guerre et la politique sécuritaire.
Nous en avons assez de cette politique qui nous mène directement dans les bras du Rassemblement National !
Il y a quelques jours, au lendemain de la publication d’un décret actant de nouvelles coupes budgétaires sur le ministère de la culture, Mme Dati expliquait sur France Inter que non qu’il n’y avait pas de nouvelle coupe budgétaire.
Madame Dati, sur France Inter expliquait que les syndicats soutenaient sa réforme de l’audiovisuel public, qui rappelons-le est une réforme qui vise à fusionner à termes France télévisions, Radio France et l’INA pour faire encore et toujours de nouvelles économies en supprimant des milliers d’emplois !
Assez de tous ces mensonges ! Nos professions méritent mieux que du mépris !
Depuis des mois, Nos professions exigent le refinancement du service public du spectacle vivant, des arts, de l’enseignement artistique, de tous nos secteurs non marchands car la situation est devenue intenable pour toutes et tous.
Depuis des mois, nous réclamons aussi le retrait de la réforme de l’audiovisuel public qui est contestée par toute la profession et qui porte une nouvelle menace contre le pluralisme et notre démocratie.
Le gouvernement fait mine de ne pas voir notre mouvement de contestation, nous devons donc l’amplifier !
Je voudrais enfin avoir une phrase particulière pour nos collègues artistes auteurs autrices. Celles et ceux qui dans nos métiers sont le premier maillon de la création, celles et ceux qui créent les œuvres. Ce sont les plasticien.ne.s, les graphistes, les scénaristes, les écrivain.e.s, les photographes, les designers, les designers textiles, les sculptrices et les sculpteurs, etc.
Ce sont les grand.e.s oublié.e.s de nos secteurs et ce sont les plus précaires d’entre nous.
Créer, hier comme aujourd’hui est une bataille. Une bataille pour être payé pour son travail artistique et sa diffusion, une bataille pour assurer un revenu, pour survivre au quotidien, pour payer le loyer, pour assumer une famille…. Une bataille pour faire face aux maladies, à la maternité, lorsque rien ou presque ne vous protège.
Alors je voudrais dire à la profession. Il nous faut coûte que coûte poursuivre notre bataille pour faire entrer les artistes auteur.ice.s dans l’assurance chômage et gagner la continuité de revenus pour les artistes auteur.ice.s !
Tous.tes ensemble, déterminé.e.s, uni.e.s, solidaires, nous allons gagner ! Notre bataille est juste ! Notre bataille est celle de la dignité !