Halte à la disparition de la pédagogie de projet dans les écoles d’art, engagée par la DGCA avec l’ANDEA
La DGCA doit cesser de sous-traiter le dialogue social à l’ANDEA !
Dans le courant de l’année 2023, la DGCA a engagé un projet de réforme de l’organisation de l’enseignement des établissements supérieurs d’arts plastiques délivrant les diplômes de DNA et de DNSEP. Ce travail de réécriture de l’arrêté de 2013 régissant ces cursus a été confié à l’ANDEA (Association nationale des Directeurs des Écoles d’Art, renommée Association nationale Des Écoles d’Art), laquelle a missionné quatre directeurs d’écoles ou directeurs des études choisis comme experts. Aucune des organisations syndicales présentes dans les écoles n’a été informée de ce travail, aucun représentant des enseignants n’a été sollicité, aucune représentation des étudiants n’a été envisagée.
Or, le document que nous sommes parvenus à nous procurer modifie profondément l’identité et les missions des écoles.
En l’état actuel, ce projet de réforme des cursus prévoit, entre autres :
- de nommer toutes nos écoles « écoles d’arts visuels » au détriment de la spécificité de nos pratiques
- de supprimer la formation commune de la 1ère année au profit d’une spécialisation par options dès le concours d’entrée
- de déprécier le poids des 2 diplômes du cursus au profit de modules de contrôle continu sur les semestres 6 et 10 : le DNA passe ainsi de 15 ECTS à 6, le DNSEP de 25 ECTS à 10
- de dissocier les soutenances et les jurys de mémoire des diplômes et jurys plastiques pour pouvoir déplacer la soutenance des diplômes sur les semestres 7, 8, 9 ou 10 au choix.
- d’intégrer la présence des directions dans les jurys d’admission
- d’introduire des modules obligatoires de « professionnalisation (dont stages) » à chaque semestre de chaque année au détriment des ECTS validant les recherches personnelles qui disparaissent
- de supprimer l’enseignement de l’histoire et de la théorie des arts au profit d’un enseignement de « théorie, critique, humanités »
- la possibilité de stages jusqu’à la fin de l’année civile de l’obtention du DNSEP.
Nos établissements placent l’acquisition d’une autonomie de projet au cœur de leur enseignement. C’est cette autonomie qui rend les étudiants aptes à créer en s’emparant des enjeux contemporains, que ce soit dans les champs de l’art, du design ou dans d’autres champs d’activité. Ce projet de réforme qui diminue la place des projets de diplômes au profit d’un contrôle continu et d’une professionnalisation rendue obligatoire à chaque semestre de chaque cycle ne procède d’aucune vision et ne peut qu’affaiblir ce qui fait la valeur des formations dispensées par nos écoles.
Il n’est pas admissible qu’une réforme d’une telle ampleur affectant profondément le sens de l’enseignement artistique et impactant tous les personnels, soit discutée exclusivement entre DGCA, ANDEA et directions, sous prétexte d’adapter nos diplômes à un nouveau contexte académique. Une réforme doit être portée par une vision et des ambitions.
Ce n’est pas la première fois que le ministère ignore le rôle légitime des instances élues (syndicats, CAP ou CE) et, à travers elle, les communautés des écoles d’art et de design.
Ce mépris des personnels est dangereux. Les écoles d’art voient leurs conditions de travail se dégrader alors même qu’exigences et injonctions -parfois contradictoires- s’empilent : ouverture à la diversité des publics, professionnalisation des cursus et ouverture à la formation en alternance, développement de la recherche, concurrence des établissements privés et des lycées. Il est vital pour les écoles que les professionnels qui y enseignent et les personnels qui y travaillent soient reconnus comme forces de proposition pour les défis qu’elles ont à relever.
Au vu des dysfonctionnements récurrents que cette absence de dialogue génère, nous demandons que les services du Ministère se donnent les moyens d’engager un dialogue social direct avec les organisations syndicales représentatives des personnels et des étudiants des écoles sur toutes les questions qui les concernent.
Nous, membres de la communauté pédagogique des écoles, exigeons :
- le desserrement du calendrier des réformes et l’organisation, avec les principaux concernés, de temps de réflexion véritables sur l’avenir des écoles d’art et de l’enseignement artistique.
- l’extension du périmètre de compétence des élus de la CE des PEN et du CNESERAC pour toutes les questions qui touchent à la vie pédagogique et scientifique des écoles.
- la création d’un CSA commun aux écoles nationales d’art ou d’une commission équivalente pour traiter toutes les questions transversales aux écoles. Cela fait 12 ans que le Ministère refuse aux syndicats la création d’un CSA commun aux écoles d’art nationales au prétexte que l’ANDEA lui suffit pour discuter avec les écoles. Mais le poids hiérarchique accordé aux personnels administratifs dans cette association malgré l’ouverture affichée exclut tout débat sincère pour nombre d’enseignants et d’étudiants. Tous les établissements sous tutelle du MC (musées, DRAC, écoles d’architecture…) ont un CSA commun : cette négation de la démocratie sociale est unique au ministère. De plus, cette association n’offre pas une représentation équilibrée des écoles, en particulier lorsqu’elle parle au nom des établissements territoriaux en diffusant des informations biaisées sur les écoles nationales.
Il n’est pas admissible que le Ministère de la culture continue à ignorer le réseau des 10 écoles nationales. Il s’agit là d’une injustice unique dans le paysage du Ministère de la culture et d’une grave entorse au principe du dialogue social.