CHSCT-Ministériel : La CGT-Culture lance une alerte !

Déclaration de la CGT-Culture au CHSCT-Ministériel du 25 Janvier 2018

Madame la ministre,

monsieur le secrétaire général, représentant la ministre,

monsieur le président de CHSCT Ministériel ,

Nous voilà donc réunis pour la première séance de cette année de notre instance ministérielle dédiée à la prévention de la santé des personnels, à la sécurité et à l’amélioration des conditions de travail.

Nous formulons le vœu pour cette année 2018 que la ministre porte une politique de prévention de la santé des personnels, de la sécurité et de l’amélioration des conditions de travail très ambitieuse et qu’elle soit très impliquée dans cette démarche auprès des services, parce que ces derniers, à commencer par le Bureau de la Santé et de la Sécurité au Travail et tous les services dédiés à ces politiques, ont besoin d’un engagement politique sans faille et de se sentir soutenus dans leurs travaux de conception, de conseil, de mise en œuvre et d’évaluation des politiques de prévention et de leur contrôle pour les inspecteurs santé et sécurité au travail.

Leur indépendance d’action est essentielle au succès des politiques de prévention comme les moyens qui leur sont donnés.

Vous avez des obligations de résultats en matière de santé des personnels.

Le programme « Action publique 2022 » porte des projets de suppressions massives d’emplois – plus d’un millier projetées pour les cinq prochaines années -, de transferts, voire d’abandons de missions, d’externalisations de filières professionnelles comme celle de l’accueil, de la surveillance et du magasinage, pour, nous dit-on, améliorer le service public, les conditions de travail et réduire les dépenses publiques.

Sur ce dernier point, nous renvoyons l’aimable assemblée à notre dernière et très appréciée communication intitulée « Une loi de finances 2018 pour les riches, et le ministère de la culture dans tout ça ? », car, quand il s’agit de faire 60 milliards d’euros d’économie pour payer les cadeaux au patronat, l’affaire nous semble mal engagée pour le devenir du service public et ses personnels. Nous rappelons que le service public est une richesse, qu’il appartient à tout le monde et non au patronat ou à ceux qui défendent ses idées !

S’il s’agit d’améliorer le service public aux usagers, sachez que les personnels et leurs représentants seront toujours à leurs côtés pour porter leur expertise professionnelle sur leur travail, sur leurs missions, encore faudrait-il que vous ouvriez le débat monsieur le secrétaire général !

Il y a besoin de débattre dans ce ministère de façon loyale et sans tabou sur le travail, son sens et son organisation avec les premiers intéressés, les personnels, tous les personnels et leurs représentants mais aussi des usagers.

Or le dialogue est empêché par des politiques et des organisations technocratiques qui imposent un certain débat, celui de la mécanique administrative totalement hors-sol et qui ne répond pas aux questionnements essentiels, à savoir quelle politique publique de la culture voulons-nous ?

Quand ouvrez-vous ce débat dans les services, dans votre administration, dans les DRAC comme la ministre l’a demandé le 4 décembre en Comité technique ministériel ?

Quand ouvrez-vous le débat avec les usagers qui n’en sont pas encore à exiger l’externalisation de la filière accueil, surveillance et magasinage.

Quand parlons-nous avec vous des missions indispensables à la démocratisation de la culture, à la protection du patrimoine et sa mise en valeur, au soutien à la création, à la lecture publique, à la liberté de la presse, à l’émancipation de nos concitoyens, au droit à l’accès à la culture dans ce pays fracturé par les inégalités sociales, territoriales et culturelles ?

C’est tout ce débat indispensable qui redonne du sens au travail ; il facilite aussi la tâche pour la suite.

Quand ? Quand tout aura été décidé entre trois technocrates plus prompts à répondre à des injonctions politiques hors sol venues du MEDEF via Matignon, qui sont loin des enjeux de démocratie culturelle qui s’imposent au service public de la culture ?

Et avec quels moyens ?

Les personnels et leurs représentants ne cessent de vous dire que les moyens doivent être revus à la hausse quand vous proposez de les réduire.

Les personnels d’encadrement réunis par vos soins n’ont-ils pas dit la même chose il y a quelques jours à la ministre ?

Entendez-vous aussi ces légitimes expressions de tous les professionnels du ministère ?

Allez-vous y répondre avec diligence et loyauté ?

N’êtes-vous pas l’assistant de la ministre dans l’administration du ministère ?

Votre rôle est essentiel pour ouvrir ce débat que tout le monde attend, encore faudrait-il faire preuve d’ouverture et avoir la volonté politique de changer le travail et de lui redonner du sens.

Nous n’avons pas réponse à tout à la CGT, mais vous non plus.

Ce que nous savons et ce que nous sommes venus vous dire est que la bonne organisation du travail sera celle qui aura fait l’objet d’un débat approfondi avec les personnels et leurs représentants, les « experts du quotidien » et du monde réel et qui répondra le mieux à la mise en œuvre la plus coopérative des politiques publiques.

Il ne s’agit pas de faire deux réunions dans un coin, triturer un organigramme et deux arrêtés et hop la messe-techno-est-dite.

Il s’agit d’organiser un débat au sein des services entre les personnels et entre services pour repenser les coopérations, les renouveler, les adapter, les rendre humaines aussi. Au passage, les rendre efficaces passe par une bien meilleure organisation du travail au sein du cabinet de la Ministre en lien avec les services d’administration centrale et la délégation à la langue française et aux langues de France ; il est temps que la ministre et le secrétaire général que vous êtes prennent l’affaire au sérieux et que des propositions respectueuses du travail et des personnels soient faites. Cela fait trop longtemps que cela dure et une bonne administration nécessite des arbitrages politiques claires, fruit d’un dialogue social nourri avec les organisations syndicales mais aussi avec les services, et retranscris dans des consignes et commandes claires aux services. Aujourd’hui, on a le regret de constater que c’est tout bonnement le contraire et sous prétexte que le cabinet serait réduit, la désorganisation serait normale ! Il est temps d’y remédier et avec diligence.

Si nous intervenons aujourd’hui sur ces questions, c’est qu’il y a urgence à le faire.

Nous le verrons aujourd’hui avec les bilans sur les accidents de travail et les maladies professionnelles réalisés par le bureau de la santé et de la sécurité au travail, que nous remercions, ainsi que tous les services du ministère qui y ont contribué.

La situation est la suivante :

– Les accidents de trajet se sont démultipliés,

– l’indice de fréquence des accidents de travail a explosé en deux ans de plus de 10 %

– les maladies professionnelles se développent dans les administrations et les salles de visites des musées et plus seulement dans les ateliers et les chantiers de fouilles archéologiques, mais elles sont aussi mieux prises en considération par les services, à défaut d’être mieux indemnisées,

– les femmes, les personnels de catégorie C et les précaires sont les premières victimes des mauvaises conditions de travail,

– la présence des médecins de prévention, pourtant indispensables dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de prévention, est contrariée par l’absence de recrutements de grande ampleur de ces professionnels,

– la situation de la santé des personnels du ministère de la culture est très mauvaise du fait de la perte de sens au travail, du fait du sous-effectif, du fait de l’intensification de la charge de travail mentale comme physique des postes de travail, du fait de l’absence d’ambition de l’autorité politique dans ce ministère à changer concrètement les conditions de travail dans le sens de leur amélioration.

L’amélioration des conditions de travail est aussi affaire de la ministre et les personnels seraient sensibles à une implication plus forte de la ministre sur ces questions.

Car depuis de nombreuses années, c’est la première fois que la ministre ne vient pas présider le chsct m. Pourtant Françoise Nyssen ne cesse de dire que le programme « Action publique 2022 » a pour objectif d’améliorer les conditions de travail des personnels. Si c’est ce que veut la ministre, il faut juste qu’elle retrousse ses manches, car cette question nécessite son implication politique forte et pas seulement des incantations… Vu la gravité de la situation, les services aussi volontaristes soient-ils ne pourront pas changer les conditions de travail des personnels pour les améliorer sans une volonté politique forte, assumée et avec les moyens requis et nécessaires à la mise en œuvre de ces politiques de prévention de la santé des personnels.

Car il faudra que Françoise Nyssen nous explique comment, en projetant de supprimer un millier d’emplois au ministère, en ignorant les grandes difficultés de coopération entre services dans ce ministère, en voulant à tout va numériser, fusionner, transférer ou abandonner des missions, elle va améliorer les conditions de travail des personnels et redonner du sens au travail et mieux le revaloriser.

La ministre doit expliquer son positionnement ; sans cela son discours s’apparente à un double discours qui confinerait au cynisme au regard de la gravité de la situation de santé des personnels.

Les chiffres du suivi ministériel des indicateurs des Risques Psycho-Sociaux portent le taux d’absentéisme en 2016 à près de cinq cents emplois équivalent temps plein sur un périmètre correspondant seulement à un tiers des effectifs du ministère. On imagine ce que cela donnerait si le périmètre entier était couvert par l’étude en question. Ces chiffres traduisent la maladie du travail dans les services, la souffrance et l’épuisement que les personnels endurent et les compensations qu’ils trouvent pour vivre, survivre.

Vouloir toujours supprimer des emplois en plus serait irresponsable au regard des responsabilités qui sont les vôtres et des obligations de résultats qui vous incombent en matière de santé des personnels.

La CGT-Culture sera prendre ses responsabilités pour s’opposer à cette politique car notre rôle est de protéger les personnels, leur santé et leur travail, coûte que coûte. Françoise Nyssen doit entendre cette alerte et tout mettre en œuvre pour que plus aucun emploi ne soit supprimé, mieux, que tout départ à la retraite soit remplacé par un nouvel emploi avec une organisation pour assurer le tuilage et mieux transmettre ainsi tous les savoirs nécessaires au bon accomplissement d’une mission. Les personnels en partance sont très sensibles à ces moments de vie professionnelle où la nécessité de boucler proprement l’affaire s’impose mais aussi le respect et la dignité de tout le travail accompli par ceux qui restent.

C’est pourquoi, le prochain CHSCT Ministériel du 11 avril doit être le lieu d’un grand débat et de décisions qui changent radicalement la donne. Nous sommes prêts par nos propositions à y contribuer et à y travailler dès à présent et nous invitons nos camarades des autres organisations syndicales à nous rejoindre.

Mais pour cela il faut des engagements politiques forts de la ministre. Nous avons besoin d’une politique ministérielle de prévention de la santé qui améliore concrètement la situation des personnels.

Paris, le 25 janvier 2018